WP_Post Object ( [ID] => 124106 [post_author] => 48457 [post_date] => 2022-10-27 07:27:31 [post_date_gmt] => 2022-10-27 07:27:31 [post_content] =>Ils sont trente et un, âgés de 21 à 87 ans. Vivant en Suède, ils sont d’origines sociales et géographiques différentes. Hommes ou femmes, ils sont mariés, séparés, veufs, en quête d’une histoire sentimentale ou ayant abandonné tout espoir. Ce qui unit ces inconnus, c’est qu’ils ont raconté comment ils vivent ou ont vécu l’amour, comment ils le conçoivent, ce qu’ils en attendent, comment ça a commencé et, souvent, fini. Leurs témoignages ont été transcrits, malaxés, épurés par Marit Kapla pour finir sur le papier. D’où vient le « magnétisme » qui émane de ces 587 pages, s’interroge Aftonbladet. Et le journal d’évoquer « une sorte de banalité cristalline dans ces brèves paroles qui nous arrivent sous forme de lignes brisées », à la limite de la poésie. Ces quidams, constate Svenska Dagbladet, « parlent du bonheur quotidien et du drame de la passion ; des pistes de danse, des petites annonces et des applications de rencontre ; des relations à distance et de la migration amoureuse ; des divorces, des nouveaux amours et des noces d’or. Des relations qui les ont brisés ou construits, des pertes qui continuent de façonner leur vie ». Ce qui est étrange, remarque la presse, c’est que Marit Kapla n’a pas rencontré les trente et une personnes en question. Elle a puisé leurs propos dans un film documentaire réalisé par Staffan Julén. Lequel Suédois a aussi filmé les entretiens réalisés, sur le même thème de l’amour, par Svetlana Alexievitch – influence revendiquée de Marit Kapla – pour un livre que la Biélorusse, prix Nobel de littérature, n’a pas encore achevé. « À qui appartient donc Kärlek på svenska, n’est-ce pas un peu tricher que de créer de la littérature de cette façon ? » demande le Dagens Nyheter. Avant, conquis, d’y voir « un appel à l’acte d’aimer ».
[post_title] => Parlez-moi d’amour [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => parlez-moi-damour [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2022-10-27 07:27:31 [post_modified_gmt] => 2022-10-27 07:27:31 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=124106 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 124110 [post_author] => 48457 [post_date] => 2022-10-27 07:27:27 [post_date_gmt] => 2022-10-27 07:27:27 [post_content] =>C’est un spectacle qui se fait de plus en plus rare : une personne debout sur le bord de la route, pouce tendu, une pancarte à la main avec une destination gribouillée au feutre. L’auto-stop est-il sur le point de tomber aux oubliettes ? Cette question est au cœur de l’essai de Jonathan Purkis, qui se décrit comme un « sociologue vagabond » : lui-même a parcouru en auto-stop près de 65 000 kilomètres avec 1 309 inconnus. Le chercheur prend pour point de départ de son récit la très ancienne tradition de voyage en autonomie que l’on retrouve déjà dans les aphorismes de Lao Tseu : « Le voyage est plus important que la destination. » Mais « c’est aux États-Unis, à l’époque de la Grande Dépression, que l’auto-stop a véritablement pris son essor et a été codifié comme un acte de solidarité sociale », détaille la London Review of Books. De Cuba à la Pologne en passant par la Corée du Nord (seul pays au monde où l’auto-stop est interdit), l’ouvrage offre un vaste panorama de cette pratique à travers les époques, jusqu’à ses avatars les plus récents – les applications de covoiturage.
[post_title] => Invitation à lever le pouce [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => invitation-a-lever-le-pouce [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2022-10-27 07:27:27 [post_modified_gmt] => 2022-10-27 07:27:27 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=124110 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 124114 [post_author] => 48457 [post_date] => 2022-10-27 07:27:22 [post_date_gmt] => 2022-10-27 07:27:22 [post_content] =>Pour le chercheur et éditeur Martin Machovec, la culture underground tchèque occupe une place à part dans le monde. Déjà parce que, comme il l’explique à Radio Praha, « elle a un sens plus large que l’underground venu d’Amérique par le rock ». Dénommée en tchèque podzemí (« souterrain »), elle se rapporte à tout ce qui était illégal, clandestin, dans la Tchécoslovaquie totalitaire de 1948 à 1989, où l’interdit était susceptible de conférer de l’intérêt à des productions même médiocres. « La répression allait de pair avec ces œuvres, note le site Aktuálně.cz. Si les communistes ne s’en étaient pas pris à ThePlastic People of the Universe [un groupe de rock tchèque], cela aurait pu être un groupe parmi d’autres, aujourd’hui oublié. » Tout cela, selon Machovec, a donné à l’underground tchèque – fait unique, là encore – la force de résister à la culture mainstream d’après 1989 et lui a assuré un bel avenir.
Certes, ses auteurs n’ont jamais été beaucoup lus : « Ils ne craignaient pas la censure puisqu’ils écrivaient sous la forme de samizdat, raconte Machovec dans le même entretien à Radio Praha. Ils n’avaient donc ni limites ni tabous, ce qui les rend difficiles à aborder. »Il en faudrait plus cependant pour décourager notre auteur, qui dans son livre s’efforce de rendre ces anticonformistes plus accessibles, en particulier ceux qui gravitaient autour du mythique Egon Bondy, écrivain, philosophe et poète, célèbre pour avoir pulvérisé dans ses écrits comme dans la vie tous les codes sociaux et politiques, les normes morales ou verbales de son époque.
[post_title] => Prague underground [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => prague-underground [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2022-10-27 07:27:23 [post_modified_gmt] => 2022-10-27 07:27:23 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=124114 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 124118 [post_author] => 48457 [post_date] => 2022-10-27 07:27:17 [post_date_gmt] => 2022-10-27 07:27:17 [post_content] =>Eziafa, un chauffeur de taxi nigérian, vivote au Texas depuis des années. Il décide de prendre un nouveau départ et retourne au pays pour épouser Zina, 18 ans, et l’emmener aux États-Unis. Là, il entend contrôler chaque aspect de sa vie, refusant d’accepter l’épanouissement de sa jeune femme et déterminé à lui « couper les ailes ». Sauf que l’intéressée, qui suit une formation d’infirmière, n’entend pas se laisser dompter. Désabusée, elle finira par refaire sa vie avec un ancien garçon de ferme anabaptiste, mais Eziafa ne la lâchera pas.
L’auteure de ce roman, la Canado-Nigériane Yejide Kilanko, 47 ans, qui est également assistante sociale, se veut « réaliste » : « Je sais que A Good Name, comme ses protagonistes, a ses faiblesses. Mais ce sont précisément ces faiblesses qui font que nous sommes tous humains. » Inspirés de parcours réels, les personnages de son septième ouvrage sont « élégants dans leur simplicité et vont au cœur de l’expérience humaine, en aspirant à échapper à des circonstances difficiles », analyse la critique nigériane Ainehi Edoro sur le site Brittle Paper.
[post_title] => Lagos, Texas [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => lagos-texas [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2022-11-17 10:17:29 [post_modified_gmt] => 2022-11-17 10:17:29 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=124118 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 124122 [post_author] => 48457 [post_date] => 2022-10-27 07:27:13 [post_date_gmt] => 2022-10-27 07:27:13 [post_content] =>Dans A Afirmação Negra e a Questão Colonial, le sociologue portugais José Luís Garcia rassemble pour la première fois les principaux textes journalistiques de Mário Domingues. Injustement oublié, cet intellectuel est pourtant le « premier auteur du XXe siècle au Portugal, également pionnier au niveau international, à traiter de la condition politique, sociale et psychologique des Noirs », souligne Garcia dans le quotidien Público. Mário Domingues naît en 1899 dans l’île de São Tomé-et-Príncipe, d’une mère angolaise – exploitée dans une plantation dès l’âge de 15 ans – et d’un père portugais, blanc, employé par le même propriétaire terrien. Amené par son père au Portugal à l’âge de 18 mois, Domingues est élevé par ses grands-parents dans la classe moyenne lisboète. Il publie ses premières chroniques à 19 ans dans le journal anarchiste A Batalha, avec lequel il continuera de collaborer jusqu’en 1928. Menant en parallèle une carrière prolifique d’écrivain, d’auteur dramatique et de traducteur, il est le précurseur de la dénonciation de la colonisation et du racisme. Il s’insurge en particulier contre le colonel Norton de Matos,qui sévit alors en Angola. « Des crimes révoltants [sont] commis impunément en Afrique en ce moment », alerte-t-il dans les pages d’A Batalha, le 1er juillet 1922. Dans ses écrits suivants, il met en cause les colons portugais qui continuent à perpétrer ces atrocités : « des pillages, des personnes brûlées, fouettées », voire enterrées vivantes ; des « chasses » pour le recrutement militaire. Alliant la défense des Noirs et des travailleurs dans une perspective anarcho-syndicaliste, il rejoindra aussi le panafricanisme.
[post_title] => Écho d’une voix décoloniale [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => echo-dune-voix-decoloniale [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2022-10-27 07:27:13 [post_modified_gmt] => 2022-10-27 07:27:13 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=124122 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 124127 [post_author] => 48457 [post_date] => 2022-10-27 07:27:07 [post_date_gmt] => 2022-10-27 07:27:07 [post_content] =>En juillet 2009, Harry Parker, soldat britannique âgé de 26 ans, a marché sur un engin explosif artisanal lors d’une patrouille en Afghanistan. Il n’a survécu que grâce à une prise en charge médicale rapide et compétente. « Privé d’une jambe (amputée au-dessous du genou), il a été transporté à Londres, où des spores fongiques ayant infecté sa jambe restante ont déclenché la gangrène. Il a de nouveau frôlé la mort avant que cette jambe ne soit également amputée (au-dessus du genou) », relate The Times Literary Supplement. Suivent des semaines et des mois de rééducation, pendant lesquels Parker apprivoise ses nouvelles prothèses de haute technologie. Il est devenu un « humain hybride », selon ses mots, « une machine à 12 % », en proportion du poids de son corps.
L’ancien militaire constate alors « un profond changement dans sa perception de lui-même », poursuit The Guardian, et se compare à Gregor Samsa, héros de La Métamorphose de Kafka, qui se réveille un matin transformé en insecte.
Dans son livre Hybrid Humans, Parker part de son expérience vécue pour examiner les implications des technologies médicales sur l’identité. « Il est particulièrement pertinent lorsqu’il décrit la psychologie de l’hybridité : comment l’esprit se fond dans la machine », souligne The Guardian. Paradoxalement, son corps est à la fois diminué (il n’a plus ses jambes) et augmenté (son genou pourvu d’un microprocesseur est comme un « deuxième cerveau »). D’ailleurs, hybrides, nous le sommes tous, rappelle-t-il, à travers l’usage de lentilles, de stents, de voitures et de smartphones. Parker se montre toutefois sceptique lorsqu’il va à la rencontre des transhumanistes, qui espèrent surmonter leurs limites physiques grâce à la technologie : « Je ne peux imaginer la douleur, l’anxiété et les frustrations éprouvées par un être sensible téléchargé sur un disque dur. »
[post_title] => Un cyborg très humain [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => un-cyborg-tres-humain [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2022-10-27 07:27:08 [post_modified_gmt] => 2022-10-27 07:27:08 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=124127 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 124131 [post_author] => 48457 [post_date] => 2022-10-27 07:27:02 [post_date_gmt] => 2022-10-27 07:27:02 [post_content] =>« Poète et tsar » est le titre d’un poème de Marina Tsvetaïeva tiré de son cycle « Poèmes à Pouchkine » (1931). C’est aussi le nom d’un film muet, premier biopic soviétique réalisé en 1927, qui met en scène les derniers jours d’Alexandre Pouchkine et ses rapports avec le tsar Nicolas Ier. Or Pouchkine a posé les jalons d’un mythe littéraire tenace, celui d’un poète s’adressant d’égal à égal à l’homme qui tient les rênes du pouvoir, soutient Gleb Morev, journaliste et spécialiste de l’histoire de la littérature russe du XXe siècle, dans une interview à Radio Svoboda. Et, même si ce dialogue n’a pas existé dans les faits, il est devenu un sujet récurrent de la littérature russe, notamment au cours de la période soviétique. Dans son ouvrage « Poète et tsar », paru en 2020, Morev explorait déjà ce thème à travers les destins de trois poètes, Ossip Mandelstam, Boris Pasternak et Joseph Brodsky. Dans une nouvelle biographie littéraire consacrée cette fois à Mandelstam, le journaliste continue à creuser le filon. Son entreprise est délicate : débarrasser l’immense poète, connu pour sa suicidaire Épigramme contre Staline et mort dans un camp de transit vers le Goulag en 1938, de l’étiquette de martyr. « Le vrai Mandelstam s’avère bien plus complexe et incohérent que l’image du poète tragique et moralement irréprochable qui ressort des Mémoires de [son épouse] Nadejda Mandelstam », précise le site Okolo. Archives à l’appui, Morev déploie un argumentaire « convaincant », selon les critiques, pour apporter de la nuance à ce récit. Il avance l’idée d’une immense méprise d’Ossip Mandelstam à propos de Staline. Ainsi, apprenant que le dictateur est intervenu en personne pour alléger sa condamnation, il vit une sorte d’« obsession poétique » et lui consacre une dizaine de poèmes élogieux. Pour les biographes, Mandelstam l’a fait pour sauver sa peau. Morev n’est pas de cet avis. Selon lui, le poète était convaincu que non seulement l’homme d’État lisait ses poèmes, mais qu’il était capable d’apprécier leur qualité esthétique. Mais « le dialogue avec Staline n’existait que dans l’esprit de Mandelstam », assure Morev. En technocrate pur et dur, le tyran n’a jamais lu les vers en question. Et c’est en cherchant coûte que coûte à établir un échange avec Staline que le poète a précipité son second exil, dont il ne reviendra pas.
[post_title] => La méprise de Mandelstam [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => la-meprise-de-mandelstam [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2022-11-21 10:06:30 [post_modified_gmt] => 2022-11-21 10:06:30 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=124131 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 124102 [post_author] => 48457 [post_date] => 2022-10-27 07:26:56 [post_date_gmt] => 2022-10-27 07:26:56 [post_content] =>Yang Li-ya s’était déjà emparée de la question du genre en 2017, avec un premier recueil dont le titre venait questionner le terme qu’on utilise en chinois pour dire « un homme, un vrai », lequel devenait sous sa plume « une femme, une vraie ». Elle y évoquait son vécu de lesbienne, son époque, les combats menés et ceux à venir (Taïwan a beau avoir légalisé le mariage des couples de même sexe en 2019, la société reste méfiante vis-à-vis de tous ceux qui s’écartent de la norme). Cinq ans plus tard, l’auteure revient avec un recueil composé de treize nouvelles. Elle s’y attaque aux clichés entourant la masculinité. Entre le livreur qui se retrouve victime d’une arnaque financière, l’employé forcé d’entendre les ébats de son camarade de chambrée avec la fille dont il est amoureux, le quinquagénaire propriétaire d’une usine en faillite, le gay harcelé sexuellement par une connaissance plus âgée ou encore l’agent immobilier peu doué, la galerie de losers est complète… Mais, d’après l’auteure Chen Hsue, grâce à « un style libre et fluide, [Yang Li-ya] parvient à donner une légèreté singulière à un sujet qui pourrait se révéler lourd ». Un ouvrage à mettre notamment entre les mains des hommes qui se sentent mal dans leur peau, suggère Chiang Ya-ni dans le magazine Okapi, puisqu’ils n’auront plus qu’à suivre l’exemple des personnages de Yang Li-ya : « Oublier l’injonction au succès et la rhétorique de la conquête, lancer leur #MeToo et accepter de ne pas toujours y arriver. Et si c’était ça, être un homme, un vrai ? »
[post_title] => Éloge de la faiblesse [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => eloge-de-la-faiblesse [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2022-10-27 07:26:56 [post_modified_gmt] => 2022-10-27 07:26:56 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=124102 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 124148 [post_author] => 48457 [post_date] => 2022-10-27 07:26:51 [post_date_gmt] => 2022-10-27 07:26:51 [post_content] =>Voici « une histoire si incroyable qu’elle pourrait être tirée d’un roman de Thomas Pynchon : on y croise Leni Riefenstahl et Che Guevara, des nazis et des guérilleros, la jungle bolivienne et le sommet himalayen du Nanga Parbat, des caméras et des revolvers, Hambourg et Cuba », s’enthousiasme Alexander Cammann dans Die Zeit. Cette histoire, qui vient de faire l’objet d’un nouvel ouvrage remarqué outre-Rhin, c’est celle de Monika Ertl et de son père Hans.
Lui s’est installé en Bolivie après la guerre : en Allemagne, même s’il n’avait pas lui-même été nazi, il avait servi la propagande du régime en collaborant avec Leni Riefenstahl comme cameraman. C’est un pionnier du film documentaire. Elle est l’une des plus étonnantes figures de l’extrême gauche des années 1960 et 1970. Son principal fait d’armes : l’assassinat le 1er avril 1971 du consul général de Bolivie, Roberto Quintanilla, dans son bureau de Hambourg. Même si l’identité de la jeune meurtrière, qui perdit sa perruque, son sac à main et son revolver dans l’affaire, n’a jamais pu être établie avec certitude, tout semble indiquer qu’il s’agissait de Monika Ertl. Elle avait de sérieux motifs d’en vouloir à Quintanilla : quelques années plus tôt, il avait fait mutiler le cadavre d’Ernesto Guevara et envoyer ses mains à la CIA afin de prouver son identité. Puis un certain Inti Peredo avait succédé au Che à la tête de l’ELN (l’Armée de libération nationale). Monika et lui étaient devenus amants. Las, il était tombé à son tour aux mains de Quintanilla, avait été torturé puis exécuté.
Monika ne survécut guère à son exploit de Hambourg. Deux ans plus tard, après un séjour à Cuba et un retour clandestin en Bolivie, elle était abattue lors d’un échange de tirs avec les autorités boliviennes à La Paz. Il est possible que Klaus Barbie, alors au service du pouvoir bolivien, ait été impliqué dans cette mort. Celui-là même que Monika avait fréquenté, enfant, le surnommant familièrement « oncle Klaus ».
L’ouvrage de Karin Harrasser n’apporte guère d’éléments nouveaux à ce que d’autres livres et documentaires ont déjà raconté. Son but est ailleurs, note Wolfgang Krischke dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung : « Mettre en lumière, à travers les vies de Monika et Hans Ertl, les réseaux transatlantiques qui existaient à droite comme à gauche de l’échiquier politique entre l’Europe, en particulier l’Allemagne, et l’Amérique latine, ainsi que la contribution des femmes aux soulèvements de 1968. » Il s’agit aussi de mettre l’accent sur une relation père-fille atypique : Monika est le fils que Hans n’a jamais eu. Elle l’accompagne dans ses expéditions dans la jungle, il lui apprend à tirer au pistolet. Après sa mort, il n’obtiendra jamais des autorités boliviennes (dont il a pourtant été très proche) qu’elles lui révèlent où elle a été enterrée. Son unique consolation sera de savoir qu’elle n’a pas été torturée.
[post_title] => Hans et Monika [post_excerpt] => [post_status] => publish [comment_status] => open [ping_status] => open [post_password] => [post_name] => hans-et-monika [to_ping] => [pinged] => [post_modified] => 2022-10-27 07:26:52 [post_modified_gmt] => 2022-10-27 07:26:52 [post_content_filtered] => [post_parent] => 0 [guid] => https://www.books.fr/?p=124148 [menu_order] => 0 [post_type] => post [post_mime_type] => [comment_count] => 0 [filter] => raw )
WP_Post Object ( [ID] => 124026 [post_author] => 48457 [post_date] => 2022-10-27 07:26:03 [post_date_gmt] => 2022-10-27 07:26:03 [post_content] =>Jusqu’à leur prise de fonctions, les dictateurs ont souvent une jeunesse assez plan-plan. Pas Jules César ! Flamine (prêtre) de Jupiter à 17 ans, réfugié politique à 18, guerrier en Asie Mineure à 20, de nouveau exilé politique à 25 ans… César va alors à Rhodes étudier l’éloquence, qui peut toujours servir. Capturé en chemin par des pirates, il négocie sa rançon tout en leur promettant les pires supplices (de fait, à peine libéré il fera crucifier ses ravisseurs, quoique après les avoir fait égorger – admirable preuve de mansuétude selon Suétone, son biographe). César rentre à Rome et vraiment en politique, parcourt à toute vitesse le cursus honorum, conspire à droite à gauche, multiplie les rivaux puis les ennemis, échappe de très peu au lynchage. Pour asseoir sa popularité au sein de la plèbe, il dépense sans compter – monuments, banquets, jeux, combats de gladiateurs… – et noue des alliances. Le sommet de l’échelle, à savoir le consulat, il l’atteint à 41 ans. (Il y a deux consuls à Rome, mais le second, Bibulus, ne fait que de la figuration, tandis que les gens disent en rigolant qu’ils vivent « sous le consulat de Jules et de César ».) Oui, une jeunesse bien remplie…
Mais pas assez au goût de César, qui pleure en voyant une statue d’Alexandre : plus jeune, le Macédonien n’avait-il pas déjà conquis un bon morceau de la planète ? À la fin de son consulat, César donne libre cours à ses tendances dictatoriales, et, pour soutenir néanmoins sa popularité, dépense de plus en plus. Sa technique s’avère payante puisqu’on lui confie, par plébiscite, deux grandes provinces, l’Illyrie et surtout la Gaule, où il va déployer pendant neuf ans ses talents militaires et son appétit de conquêtes (jusqu’en Bretagne et en Germanie). Son palmarès militaire est stupéfiant : 300 tribus soumises, 3 millions d’hommes combattus dont les deux tiers finissent en cadavres ou en esclaves, 800 cités rasées et une seule vraie défaite (la bataille de Gergovie). Pour cristalliser ses hauts faits, il rédige en quelques semaines La Guerre des Gaules, qui lui permet d’ajouter une nouvelle plume à son chapeau, celle d’un des meilleurs écrivains de l’Antiquité. À son retour, en 49 av. J.-C., il n’a plus qu’un seul vrai rival, Pompée. Pour s’en défaire, César piétine la loi et franchit avec ses légions le Rubicon, petite rivière qui borne sa zone de commandement, déclenchant ainsi une guerre civile. Il la gagne et poursuit Pompée jusqu’en Égypte, où la tête de son rival finira en haut d’une pique tandis que la sienne se retrouvera dans le giron de Cléopâtre. Car, côté vie privée, César ne déçoit pas non plus. Fiancé à 15 ans avec une richissime bourgeoise, il la plaque à 17 pour Cornelia, fille de Cinna, aussi riche et beaucoup plus conséquente politiquement. Suivront deux autres officielles, Pompeia, petite-fille du dictateur Sylla, puis Calpurnia, fille de Lucius Calpurnius Piso Caesoninus – toutes deux fortunées et de familles influentes. Car la conquête du pouvoir coûte très cher et exige des alliés puissants. Mais les femmes ne sont pas que des atouts financiers ou stratégiques, elles ont des charmes spécifiques qui le poussent à multiplier les aventures tous azimuts (même avec des provinciales, note un Suétone admiratif), avec une prédilection pour les épouses de ses rivaux, voire de ses alliés. Pense-t-il par ses prouesses de séducteur effacer un épisode de jeunesse, lorsqu’il était en poste auprès du roi Nicomède ? En effet, « naquit alors une rumeur selon laquelle il se serait prostitué à ce souverain », écrit Suétone sans souci du politiquement correct. Les Romains ne seront pas dupes et chantonneront volontiers : « César est le mari de toutes les femmes – et la femme de tous les maris ! »
Qu’est-ce qui pousse César à déployer autant d’énergie et de courage, politiquement, militairement et amoureusement, de jour comme de nuit ? C’est la question que Suétone – Caius Suetonius Tranquillus, de son nom latin – ne pose pas, quoiqu’il semble y répondre. Suétone fait traditionnellement un peu pâle figure à côté de ses contemporains, les historiens Plutarque et Tacite. On le trouve imprécis, peu fiable, porté sur les cancans. Or ce bibliothécaire polygraphe, qui écrit un siècle et demi après la mort de César, fait preuve d’une approche holistique plutôt moderne. Il considère ses sujets dans leur globalité, politique, existentialiste, psychologique et même physique, les traits du visage révélant pour lui ceux de l’âme. Son César est mieux qu’un proto-Napoléon : un authentique surhomme. Formidable résistance physique malgré une petite santé, courage incroyable et exceptionnels talents de leader, de chef de guerre, d’administrateur ; écrivain remarquable ; séducteur impénitent et on en passe… Suétone tente surtout de comprendre la « passion de l’hégémonie » qui anime César, une ambition stratosphérique, inassouvissable, qu’on s’explique mal. À 20 ans, notre Romain ne fait-il pas déjà quasiment figure d’homme arrivé, grâce notamment à ses origines prestigieuses : royales du côté maternel et carrément divines du côté paternel, les Iulii descendant de Vénus via Énée ? Son ambition exprimerait-elle des intentions idéologiques, politiques, religieuses ? A priori, non. L’aristocratique César méprise et malmène le Sénat et les classes supérieures (les optimates) ; et, s’il s’appuie sur la plèbe de Rome, qu’il couvre de bienfaits, il la méprise tout autant. De la république, socle de la société romaine, il dit qu’« elle n’est rien, juste un mot sans consistance, une illusion », rapporte Suétone. La religion, il la traite complètement par-dessus la jambe (« Jamais aucune considération religieuse ne l’amena à renoncer à quelque entreprise »), jusqu’à ce qu’elle lui devienne utile – et qu’il soit lui-même divinisé. C’est un opportuniste invétéré qui ne recule devant aucune alliance. Serait-ce alors l’appétit du lucre qui le meut ? Mais son ascension lui coûte d’abord plus qu’elle ne lui rapporte, et ses dettes sont colossales. César aime clairement le pouvoir, qu’il exerce très bien, unifiant l’Italie, étendant son empire, aménageant le pays et embellissant sa capitale, réformant efficacement ses institutions.
Pourtant, César aime surtout César – et les honneurs qui lui sont rendus : cérémonies (les triomphes), distinctions (comme de voir un mois, Iulius, nommé d’après lui après avoir réformé le calendrier), statues, monuments, parures, palais… Il aime aussi les titres, qu’il a tous obtenus : consul, dictateur (une fonction quasi légale), grand pontife, imperator, demi-dieu… Tous, sauf celui de roi. Celui-là, qui horrifie les Romains, si fiers de leur république, le désire-t-il vraiment ? On lui offre pourtant à plusieurs reprises la couronne – au sens propre du terme, puisqu’on en dépose sur sa statue ou sur sa tête. Il refuse cette promotion, quoique assez mollement. C’est même ce qui causera sa perte.
Suétone attribue encore une autre cause à l’inassouvissable appétit de pouvoir de César : une altération psychologique consubstantielle à l’état de dictateur, la paranoïa. Pour conquérir le pouvoir, puis le conserver, tous les coups sont permis. D’où pléthore d’ennemis, dont il faut ensuite prévenir la vengeance. Si César franchit le Rubicon, c’est, allègue Suétone, parce qu’« il avait peur qu’on le forçât à rendre compte des actions qu’il avait menées pendant le premier consulat ». Or se protéger implique d’espionner et de réprimer, donc d’accroître son impopularité et, partant, les dangers. Un cercle vicieux sans autre issue que l’exil ou la mort. Celle de Jules César, sans doute l’événement le plus spectaculaire de sa vie, survient lorsque, après quelques années de pouvoir absolu, les rancœurs des uns et des autres explosent, tandis que les prétextes à conjuration se multiplient – de présumées velléités monarchiques, notamment. Un attentat prévu le jour des ides de mars (soit le 15 mars 44 av. J.-C.) est organisé, pas vraiment discrètement, par 60 conjurés menés par Marcus Brutus. César en est averti par sa femme, qui rêve de sa mort la nuit précédente, par les dieux, qui redoublent de présages funestes, et par des informateurs bienveillants. Mais il choisira d’assister tout de même à la réunion du Sénat, sans son escorte de gardes du corps ibères, faisant même fi d’un billet glissé dans sa main avec la liste des conspirateurs. Il semble aller presque de son plein gré au-devant des 23 coups de couteau que lui porteront les conjurés, dont celui de son protégé, l’ingrat Marcus Brutus (qui n’est pas son fils adoptif et qu’il n’accueillera pas d’un « Toi aussi, mon fils ! » en latin, mais plutôt d’un touchant « Toi aussi, mon petiot ! » en grec). Suétone s’interroge. Peut-être Jules César ne souhaitait-il pas « vivre plus longtemps pour voir sa santé décliner », à moins qu’il n’ait préféré « succomber une fois pour toutes aux pièges qui le menaçaient de tous côtés plutôt que de vivre perpétuellement aux aguets ». L’immensément courageux César aurait-il donc eu peur de la vieillesse, et de sa propre peur ?
— J.-L. M.
Extrait :
« À ce qu’on rapporte, il était grand ; son teint était blanc ; ses membres, bien tournés ; sa bouche, un peu trop charnue ; ses yeux, noirs et vifs ; sa santé, solide, si ce n’est qu’à la fin il était atteint, de façon chronique, d’évanouissements soudains et même de terreurs nocturnes. À deux reprises, il fut également frappé par des attaques d’épilepsie au beau milieu de ses activités. Il était particulièrement exigeant pour ses soins physiques, au point qu’il se faisait non seulement tondre et raser avec précision, mais aussi épiler – et cela suscita la réprobation de certaines personnes – ; au point aussi qu’il supportait très mal sa calvitie disgracieuse, qui lui attirait souvent des quolibets de ses détracteurs. C’est la raison pour laquelle il avait l’habitude de ramener vers l’avant du crâne sa chevelure qui se clairsemait ; en outre, parmi tous les honneurs que lui décernèrent le Sénat et le peuple, il n’y en eut aucun qu’il accueillît et exploitât plus volontiers que le droit de porter en permanence la couronne de laurier. Sa mise aussi, dit-on, le rendait remarquable, car il arborait un laticlave frangé qui lui descendait jusqu’aux mains et par-dessus lequel il serrait toujours une ceinture – du reste, elle le serrait fort peu. »
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