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Deux manuscrits inédits d’Ignacio Aldecoa (1925-1969) ont été découverts dans un dossier de la Sección de Censura de l’Archivo General de la Administración à Alcalá de Henares par le professeur Álex Alonso Nogueira, qui préparait l’exposition Ignacio Aldecoa. El oficio de escribir à la Biblioteca Nacional de España. Ces textes – Ciudad de tarde et El Gran Mercado –, envoyés à la censure franquiste dans les années 1950 mais jamais publiés, offrent un nouveau regard sur l’évolution narrative de l’écrivain phare de la Generación del 50. L’un d’eux sera prochainement présenté au public à Madrid.
À Cracovie, la manifestation Targi Książki bez Cenzury – présentée comme un « salon du livre sans censure » organisé dans un hôtel du quartier Kazimierz – a suscité une vive polémique. Cette foire parallèle a exposé des ouvrages accusés de tenir des propos antisémites et hostiles à l’Ukraine, tels que Żydzi, masoni we wspólnej pracy ou Ukropolin, critiqués pour leur contenu discriminatoire. L’association Otwarta Rzeczpospolita a dénoncé une récupération de l’événement par des cercles d’extrême droite plutôt qu’un espace de liberté éditoriale, relançant le débat sur la frontière entre liberté d’expression et diffusion de discours haineux.
Au Japon, certaines bibliothèques municipales et universitaires intègrent désormais des assistants basés sur l’intelligence artificielle, comme Shisho, qui guident les usagers dans leurs recherches documentaires en exploitant des données bibliographiques. Cette technologie vise à alléger la charge des bibliothécaires et à enrichir l’expérience des lecteurs, en proposant des suggestions pertinentes même à partir de requêtes vagues. Toutefois, son adoption soulève des enjeux techniques, éthiques et juridiques, notamment sur la fiabilité des réponses, les biais potentiels et la protection des données personnelles, interrogeant la place de l’IA dans des institutions dédiées à l’accès au savoir.
La romancière britannique Joanna Trollope, figure majeure du roman contemporain et observatrice fine des relations familiales, est décédée à 82 ans à son domicile en Oxfordshire, le 11 décembre 2025, a annoncé son agence littéraire. Auteure de plus de trente ouvrages – souvent centrés sur la vie domestique et les dynamiques humaines –, elle avait su toucher un large public, malgré l’étiquette parfois réductrice d’« Aga saga ». Son œuvre, traduite et adaptée, laisse un héritage durable dans le paysage littéraire anglophone.
En Biélorussie, 123 personnes détenues, dont des écrivains, traducteurs et défenseurs de la liberté d’expression, ont été libérées le 13 décembre, à l’issue de négociations entre les autorités de Minsk et les États-Unis, qui visent un allègement des sanctions économiques. Parmi les libérés figurent des membres du PEN Biélorussie comme Ales Bialiatski, lauréat du prix Nobel de la Paix, Maksim Znak et Aliaksandr Fiaduta, ainsi que le traducteur Siarhiej Paŭłavicki et le journaliste Pavieł Sieviaryniec, transférés en Ukraine ou en Lituanie. PEN International salue ce geste mais souligne que de nombreux prisonniers politiques restent incarcérés et que l’exil forcé n’équivaut pas à une justice pleinement rétablie.
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Voici plus de 125 ans Sigmund Freud proposait que les rêves représentent l’accomplissement de désirs réprimés. Il ne pouvait savoir ce que les expérimentateurs ont découvert après la Seconde Guerre mondiale. Nos rêves les plus vifs et complexes se produisent pendant une phase du sommeil bien précise, celle pendant laquelle, sous nos paupières fermées, nos yeux oscillent rapidement de droite à gauche, tandis que notre corps est (en règle générale) paralysé à partir du cou (atonie musculaire). C’est le sommeil paradoxal. En réalité nous rêvons aussi pendant les phases de sommeil lent, mais le plus souvent nous n’en gardons aucun souvenir. Les rêves dont nous nous souvenons nous mettent nous-mêmes sur le devant de la scène, en présence de personnes de notre entourage, vivantes ou mortes, parfois de célébrités. Il s’agit pour l’essentiel d’expériences visuelles, impliquant plus rarement le goût ou l’odorat ; des paroles sont échangées. La chercheuse canadienne Michelle Carr se penche plus particulièrement sur les cauchemars, plus fréquents chez ceux dont l’enfance a été perturbée et dont la récurrence peut faire l’objet d’une thérapie.
Mais la principale leçon de ce livre prudent et modeste, souligne le neurologue Russell Foster dans le Times Literary Supplement, c’est que les fonctions du rêve restent l’objet de conjectures. Les expériences menées depuis les années 1950 n’aboutissent qu’à de très vagues conclusions : rêver joue sans doute un rôle dans l’organisation des souvenirs et dans le contrôle des émotions. L’une des pistes de recherche les plus intéressantes tient au phénomène du rêve dit lucide, pendant lequel on est conscient de rêver et en mesure de contrôler partiellement certains aspects du rêve. Le rêve lucide peut contribuer à résoudre des problèmes logiques ou artistiques, en offrant des réponses qui nous échappaient dans notre vie éveillée. Le rêve est « l’une des branches de la science les moins testables », conclut Russell Foster.
[post_title] => Mais à quoi donc servent les rêves ?
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On connaît mal le destin des pieds noirs espagnols, contraints à l’exil après l’indépendance de l’Algérie en 1962. Le roman de Maria Dueñas, raconté à la première personne, met en lumière un épisode peu connu à travers le personnage de Cecilia Belmonte, une jeune Espagnole en fuite à cause d’un crime involontaire. Elle débarque à Oran dans les années 1920, sous un faux nom, avec pour tout bagage une détermination farouche de survivre. Soumise à des travaux ardus et ingrats, forte de son audace et de sa ténacité, elle devient une entrepreneuse accomplie. Au fil de ses aventures et de ses épreuves, on rencontre ses amis, ses associés, ses amours éphémères, un mari violent et sa relation tumultueuse avec l’homme de sa vie.
María Dueñas peint avec une sensibilité rare les saveurs, les odeurs, les couleurs de la Méditerranée, ce carrefour où se croisent et s’affrontent les cultures espagnole, française et arabe. Le chapitre qui raconte son accouchement difficile dans le trou où vivaient les lavandières à Sidi Bel Abbès et la chaîne d’entraide qui se met en place entre elles est remarquable.
« Le roman aborde l’exil, l’identité et la résilience, avec une critique sous-jacente de l'impérialisme français qui s'effondre comme un château de cartes » souligne l’écrivain Andrés García Pérez-Tomás dans la Revista Cervantes. « Dueñas ne prêche pas, elle montre, et c’est ce qui compte. Le titre lui-même – Por si un día volvemos (« Au cas où nous reviendrions un jour ») – est un clin d’œil ironique à cette nostalgie qui nous ronge de l’intérieur. Il y a un symbolisme subtil, comme la mer Méditerranée qui unit et sépare les cultures, un pont brisé qui évoque les diasporas espagnoles de l’après-guerre. En 2025, où les migrations font toujours l’actualité, ce roman pique comme du sel sur une plaie, remettant en question les héritages coloniaux sans tomber dans le pamphlet. »
Trois romans de María Dueñas sont déjà parus en français : Soledad, L’Espionne de Tanger et Sira, le retour à Tanger (Points Seuil).
[post_title] => Le drame des pieds noirs espagnols
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Nous ne sommes que des cobayes dans le laboratoire de Dieu, disait Tennessee Williams. Aujourd’hui Dieu, s’il existe, nous teste comme jamais, avec la stupéfiante intelligence artificielle, la non moins stupéfiante biologie synthétique et d’autres broutilles qui depuis la bombe atomique bouleversent l’horizon de l’humaine condition. Jamais le cliché « on n’arrête pas le progrès » n’a manifesté une telle pertinence – du moins si l’on s’en tient au progrès technologique. De quoi nourrir les plus folles aspirations, mais aussi la plus vertigineuse inquiétude. L’écologiste britannique Paul Kingsnorth n’est certes pas le premier à écrire un manifeste « contre la machine », mais il innove en se créant un nouveau label, celui de « radical réactionnaire ». Il a changé son fusil d’épaule. Fini le temps du militantisme mainstream, quand il s’enchaînait à un pont ou narguait les gaz lacrymogènes lors d’un sommet du G8. Devenu l’une des principales figures du mouvement écologiste en Grande-Bretagne, il a soudain tourné casaque, pour partir cultiver son jardin dans des conditions spartiates avec sa femme et ses deux enfants (protégés de la « cocaïne des écrans ») dans une ferme dans l’ouest de l’Irlande. C’était en 2014, l’année de la fameuse « Marche pour le climat » (plus de 300 000 manifestants rien qu’à New York). Il avait cessé de croire à l’efficacité des actions menées pour préserver l’environnement, qu’elles le soient par les militants, les ONG ou les États. La partie est perdue, l’effondrement inévitable. La notion de politiques « soutenables » un mythe.
Dans ce nouveau livre il franchit un pas de plus. Converti au christianisme orthodoxe, il dénonce le caractère diabolique d’une modernité qui est en passe de dissoudre le sel de d’humanité. Il cite G. K. Chesterton : « Ce qui assure à la vie sa poésie et ses ardentes possibilités, c’est l’existence de ces grandes et claires limites qui nous forcent à affronter les choses que nous n’aimons pas ou n’attendons pas ». Or ces limites sont en train de s’écrouler. C’est là l’originalité de Kingsnorth, souligne Tyler Austin Harper dans The Atlantic : les limites qu’est en train de piétiner l’homme dans sa relation avec la nature, les limites que repoussent et menacent d’éliminer les progrès du génie génétique ou de l’intelligence artificielle « ont beaucoup en commun avec les idées progressistes sur le sexe, la sexualité et le genre ». Voilà évidemment de quoi heurter les esprits. Le militant écologiste John Halstead, naguère un fan de Kingsnorth, voit désormais en lui un « protofasciste transphobe ». Absurde, cela va sans dire. Ce que propose Kingsnorth, c’est simplement de savoir dire « non » ; même si « tout est compromis » (il se sert d’Internet, quand même !), se construire son cocon, « en parallèle, se retirer pour créer, construire sa zone de refus culturel ».
[post_title] => Il n’y a plus de limites
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Un étrange culte orientalo-érotico-mystique a surgi en Californie – où d’autre ? – à la fin des années 1980 : la célébration de l’orgasme féminin comme moyen d’atteindre « le bonheur, la plénitude sexuelle et la communion avec l’Univers ». La journaliste Ellen Huet, qui retrace l’histoire de ce culte devenu business, commence en décrivant une cérémonie d’initiation à laquelle elle a assisté. L’impétrante était allongée sur une sorte d’autel, à moitié dévêtue (le bas !), les plantes des pieds jointes et les genoux écartés « comme les ailes d’un papillon », environnée de fumigations et de musique douce. Un homme en noir (vêtu en entier, lui) était penché respectueusement sur « l’origine du monde » de la dame et y pratiquait de longues et savantes manipulations afin de mener celle-ci à « l’extase de la connexion universelle » – bref quelque chose de bien au-dessus du tout venant du septième ciel. La dame de ce jour-là était Nicole Daedone – et celle-ci a eu le sentiment « d’être une voiture parvenue à se dégager d’un embouteillage ». Nicole était une quintessence de la Californienne enflammée de sex (sous toutes les formes), drugs (beaucoup et non des moindres) et bien sûr rock'n'roll, mais aussi une Américaine, entreprenante et très business, qui a décidé non seulement de promouvoir cette formidable révélation « qu’elle se sentait appelée à partager avec toutes les femmes du monde » mais également de la monétiser. Elle a donc fondé en 2004 OneTaste, que Helena Aeberli décrit dans la Los Angeles Review of Books comme « un mixte de communauté hippie et de marque de wellness haut de gamme – une résurgence des mouvements de santé holistique et de spiritualité New Age avec leurs charismatiques leaders et la libération sexuelle en toile de fond, mais également une anticipation des grandes vogues actuelles, depuis l’autoréalisation individuelle et l’essor de l’industrie du bien-être jusqu’à l’avènement de la femme big boss ». L’OM (pas le club de foot, mais : Méditation Orgasmique, à prononcer Ooooom comme dans le mantra indien) allait vite devenir un big business en forte croissance, avec des centres dans plusieurs villes, dont Londres, et un marketing plus que vigoureux qui génèrerait jusqu’à 10 millions de dollars de chiffre d’affaires. OneTaste se diversifiera dans l’organisation de « séminaires » et d’« ateliers » et la publication d’ouvrages techniques (car la pratique de l’OM est « aussi complexe que celle du piano »), tandis que le mouvement prendra peu à peu des allures de culte. Et, comme dans toute bonne secte qui se respecte, Nicole se mettra à soustraire des sommes rondelettes à ses adeptes (qui doivent souvent s’endetter) tandis que les employés sont sous-payés et même placés sous emprise. Bloomberg Businessweek mandate alors, en 2017, la journaliste-autrice Ellen Huet pour qu’elle enquête sur OneTaste, car la finance commence à inquiéter (s’agirait-il d’une pyramide de Ponzi ?). Très pro, donc soucieuse d’explorer le pour de l’OM (no comment) mais aussi le contre, Ellen Huet interroge à tout va – et recueille des récits alarmants. La redoutable Nicole dirigerait en gauleiter une camarilla de jeunes et jolies personnes censées se soumettre aux désirs des client(e)s et surtout des investisseurs. Plus inquiétant même, des millions de dollars sont engloutis dans l’affaire avec pour lesdits investisseurs un dérisoire retour, financier du moins ! L’article sera publié en juin 2018, toutes les sirènes se déclencheront, le FBI s’en mêlera, des mois de procédures vont suivre, Netflix produira un film, etc. En 2023, Nicole et sa n° 2 seront condamnées pour « travail forcé », donc potentiellement à 20 ans de prison (appel en cours). Entretemps OneTaste aura été vendu (12 millions de dollars tout de même) et continuera d’opérer, mais sous un autre nom, en sourdine et dans les clous... À l’issue du procès, Ellen Huet sera prise à partie par des groupies : « On te hait ! On te hait ! » Sans doute considéraient-elles que l’OM « était une idée géniale, capable de secourir bien des gens, mais hélas entre les mains d’une personne assoiffée de pouvoir ». De là à dire que tout est bien qui finit mal…
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Près d’un siècle après qu’il s’est produit, le krach de Wall Street de 1929 continue de fasciner. Loin d’en effacer le souvenir, la crise financière de 2008, d’une ampleur comparable, n’a fait que renforcer l’intérêt pour cet événement dramatique. L’effondrement spectaculaire de la bourse de New York les 24, 28 et 29 octobre 1929, passés dans l’histoire économique sous le nom de « jeudi noir », « lundi noir » et « mardi noir », n’était pas le premier épisode de ce type. Lors de la panique de 1907, les cours avaient chuté jusqu’à la moitié de leur niveau de l’année précédente, contraignant les banques rassemblées à l’initiative du puissant J. P. Morgan à sacrifier quelques-unes d’entre elles pour sauver celles qui pouvaient l’être. Ce ne fut pas non plus le dernier krach du XXe siècle : en 1987, après une dégringolade des cours du même ordre de grandeur, le désastre fut évité grâce à l’injection massive de liquidités dans le système bancaire par la Réserve fédérale des États-Unis (FED). En 2008, elle répéta d’ailleurs l’opération à l’échelle mondiale. Mais en 1929, la FED encore peu aguerrie (elle avait été créée en 1913) n’intervint que trop tard et de manière insuffisante, jouant avec réticence le rôle de prêteur en dernier ressort. La crise boursière se transforma rapidement en une crise bancaire, puis celle-ci en une crise économique de longue durée.
La relation exacte entre le krach de 1929 et la Grande Dépression des années 1930 est un sujet de controverse parmi les économistes. Mais il a incontestablement donné le signal de son déclenchement. L’épisode a fait l’objet d’innombrables analyses. Au milieu des années 1950, John Kenneth Galbraith lui a consacré un livre qui demeure un classique. Trouvant dommage que cette suite d’événements ait exclusivement bénéficié de l’attention des économistes et des historiens, le journaliste Andrew Ross Sorkin raconte son histoire dans sa dimension de drame humain. Sur le modèle de Too Big to Fail, son ouvrage sur la crise financière de 2008, son récit se concentre sur les agissements et les sentiments d’une série de personnages-clés. Parce qu’il est spécialisé dans le journalisme économique et financier, qu’il a lu tout ce qui a été écrit sur le sujet et effectué huit ans de recherches sur des archives en partie inédites, ce récit est solide et bien informé. Le livre prend la forme d’un thriller avec suspense et rebondissements, et on peut légitimement s’attendre à ce qu’il soit un jour adapté au cinéma ou donne lieu à une série télévisée, comme son ouvrage précédent.
Au moment où le krach de Wall Street s’est produit, l’état de santé de l’économie américaine n’était pas éclatant. Dans un environnement international instable marqué par des tensions importantes sur le marché des produits agricoles, des matières premières et des produits industriels, après une période d’expansion et de croissance, la production avait commencé à baisser. Surtout, depuis plusieurs mois, un phénomène « d’orgie spéculative » faisait rage. Longtemps, dans l’Amérique puritaine, le crédit et l’emprunt étaient restés frappés d’opprobre. Mais avec le développement du marché de l’automobile, la formule de l’achat à tempérament avait fait son apparition, pour s’étendre bientôt à l’achat d’appareils domestiques. Dans les milieux bancaires germa l’idée de l’appliquer au domaine des actions, en offrant aux acheteurs des conditions extrêmement tentantes : grâce à la technique de l’achat « à la marge », ils pouvaient acquérir une action en ne payant que 10 % de son prix, empruntant les 90 % restants à l’agent de change, qui se les procurait auprès d’une banque. Les actions ainsi achetées ne l’étaient pas dans le but d’en toucher les dividendes, mais dans un but spéculatif : si les cours continuaient à monter, leur revente rapide engendrait un bénéfice que l’acheteur et le courtier se partageaient. Des millions d’Américains de toutes classes sociales se mirent ainsi à spéculer. Des agences de courtage s’ouvrirent à tous les coins de rue. Les cours ne cessaient de monter, sous l’impulsion de la conviction générale qu’ils allaient continuer à grimper. Ils le faisaient d’ailleurs d’autant plus facilement qu’ils étaient manipulés par des groupes d’investisseurs qui, en toute légalité (les activités boursières et bancaires étaient alors peu réglementées), et parfois en plein jour, les faisaient monter artificiellement.
Des voix s’élevèrent pour mettre le public en garde. L’économiste Roger Babson, par exemple, prévint à plusieurs reprises : « Tôt ou tard, un krach va se produire, qui affectera les valeurs de premier ordre et entraînera une chute de 60 à 80 points de l’indice Dow Jones ». Mais son prestigieux confrère Irving Fisher se montrait, lui, résolument optimiste. « Les prix des actions, déclarait-il le 15 octobre, ont atteint ce qui semble être un haut plateau permanent. […] Je m’attends à voir le marché des actions à un niveau sensiblement plus élevé d’ici quelques mois. » Deux semaines plus tard, les cours s’effondraient, ruinant une grande quantité de spéculateurs. Andrew Ross Sorkin démonte à cet égard le mythe voulant que le krach engendra une vague de suicides. Il y en eut, certes, mais pas dans les proportions parfois évoquées.
Parmi les personnages pris dans la tourmente du krach dont les histoires servent de fil conducteur au récit, deux figures se détachent. La première est celle de Charles Mitchell, président de la National City Bank. Promoteur enthousiaste de la technique de l’achat « à la marge », il est étroitement associé aux initiatives financières risquées qui conduisirent à la débâcle. Pour cette raison, il a été un peu vite tenu pour un des principaux responsables de celle-ci, particulièrement par le sénateur Carter Glass, qui le poursuivit longtemps de son hostilité. En 1933, il eut à répondre des pratiques de la National City Bank avant et durant la crise devant une commission du Sénat. Il perdit lui-même beaucoup d’argent. Lorsque les cours commencèrent à s’écrouler, apprenant, au retour d’une réunion du bureau de la Réserve fédérale de New York, dont il faisait partie, que la National City Bank, pour éviter que ses actions ne tombent trop bas, en avait racheté une très grande quantité, sachant que la banque n’avait pas de liquidités en suffisance, il n’hésita pas à emprunter personnellement 6 millions de dollars à la banque J. P. Morgan pour acquérir secrètement ces actions lui-même, les ajoutant au stock qu’il détenait. Durant les semaines qui suivirent la panique, il en vendit un certain nombre. Accusé d’évasion fiscale pour en avoir vendu d’autres par la suite, à sa femme, afin de pouvoir déclarer des pertes l’exemptant d’impôt, il fut acquitté au pénal mais condamné au civil.
Une autre personnalité au centre des événements est Thomas Lamont, directeur général de facto de la banque J. P. Morgan. À la mort de J. P. Morgan, son fils lui succéda à la tête de la banque. Assez lucide et honnête pour se savoir moins compétent que son illustre père, il laissa Thomas Lamont gérer l’établissement. Infatigable promoteur des intérêts de la banque aux quatre coins du monde, une des premières personnalités de la finance à figurer en couverture des magazines, Lamont fut pris par surprise par l’effondrement de la bourse. Comme J. P. Morgan l’avait fait en 1907, il réunit les directeurs des grandes banques du pays pour réaliser en secret un achat massif de valeurs sûres. Mais, cette fois, cela ne fut pas suffisant pour enrayer la chute. Il avait d’ailleurs prévenu les membres de la commission de la bourse : « Aucun individu, ou groupe d’individus, n’est en position d’acheter toutes les actions que le public américain peut vendre. »
Une des figures les plus flamboyantes du récit de Sorkin est le légendaire trader Jesse Livermore. Objet de « fascination, d’envie et de suspicion », observé avec une attention passionnée par tous ceux qui voulaient percer le secret de ses succès, c’était un spécialiste de la spéculation à la baisse, la vente à découvert. La hausse continue des cours, au cours des premiers mois de 1929, ne lui permit pas de déployer ses talents en la matière, mais le krach de 1929 le laissa plus riche que jamais. À la suite d’un de ces coups audacieux dont il était coutumier, il perdit par la suite presque tout. « Comme tous les parieurs, remarque Sorkin, il vivait plus pour l’excitation du risque que pour les profits. » Après de nouveaux déboires, il se suicida en 1940, laissant à sa troisième et dernière femme une lettre dans laquelle il déclarait être « fatigué de lutter ».
Toute la seconde moitié du livre d’Andrew Ross Sorkin est consacrée aux suites du krach. Le récit court en effet jusqu’en 1933, après l’élection de F. D. Roosevelt à la présidence des États-Unis. Il est courant de tenir son prédécesseur Herbert Hoover pour largement responsable de la crise de 1929 et de considérer Roosevelt comme celui qui a permis aux États-Unis de commencer à en sortir. Sorkin réhabilite Hoover. Certes, celui-ci a longtemps cru que le gouvernement devait surtout se garder d’intervenir dans la vie économique, mais face à la catastrophe il revint sur cette position de principe. Lorsqu’il se décida à agir, il se heurta toutefois à la résistance du Congrès, où dominaient les partisans d’une non-intervention, et à l’opposition féroce de son secrétaire au Trésor Andrew Mellon, convaincu que la crise était un développement naturel dans le cycle des affaires et allait très heureusement « liquider la main-d’œuvre, liquider les actions, liquider les agriculteurs, liquider l’immobilier. Purger le système de toute corruption. » Hoover parvint malgré tout à mettre en place une agence fédérale de prêt qui permit de sauver un certain nombre d’entreprises de la faillite, sans parvenir pour autant à relancer l’activité économique. Durant les derniers mois de son mandat, il déploya discrètement des efforts considérables pour convaincre Roosevelt, qui avait été élu mais n’avait pas encore pris ses fonctions, d’appuyer l’idée d’une suspension temporaire des transactions bancaires. Soucieux, pour des raisons politiques, de ne s’associer à aucune initiative de son prédécesseur et de donner l’impression d’un tout nouveau départ, Roosevelt attendit son investiture pour adopter lui-même cette mesure.
On a reproché à Sorkin de se montrer trop indulgent à l’égard de certains des hommes dont il raconte l’histoire. Il ne condamne en effet que ceux qui se sont livrés à des actes clairement illégaux, sans mettre en cause le comportement tout de même contestable de plusieurs autres, au motif que « le marché n’est pas un concours de vertu ou d’honneur ». À l’inverse, certains l’ont accusé de trop suivre l’interprétation de Galbraith, qui attribue fondamentalement le krach à la spéculation et l’absence de réglementation et explique qu’il ait conduit à une crise par la combinaison de faiblesses structurelles du monde des entreprises et des banques et d’une mauvaise appréhension des lois de l’économie par les autorités. Aux yeux de ces commentateurs, le krach n’était en effet jamais qu’une saine correction du fonctionnement du marché et la Grande Dépression fut la conséquence des politiques d’esprit keynésien mises en œuvre après 1929. Pour le monétariste Milton Friedman, pourtant généralement hostile à l’intervention de l’État dans l’économie, c’est la réticence du gouvernement et de la FED à contrer la contraction de la masse monétaire en prêtant massivement aux banques qui transforma une récession ordinaire en profonde dépression.
Sorkin, qui a foi dans le marché et le capitalisme et considère même qu’un peu de spéculation est utile à l’innovation et la croissance, voit surtout dans l’histoire du krach de 1929 une invitation à la modestie. La nature humaine étant ce qu’elle est, « l’antidote à l’exubérance irrationnelle […] est l’humilité ». Conçu comme un thriller, 1929 se veut aussi un avertissement. Le livre ne contient aucune comparaison explicite avec la crise financière de 2008, ni avec la situation boursière actuelle. Mais on voit bien les points communs. L’engouement extraordinaire dont fait aujourd’hui l’objet l’intelligence artificielle, en propulsant les actifs des sociétés du secteur très au-delà de la valeur économique réelle de leur activité, engendre la formation d’une bulle financière. La question n’est pas de savoir si elle va éclater (toutes finissent par le faire), mais quand et, surtout, compte tenu de l’environnement économique dangereux (dettes publiques et privées énormes, endettement caché dans le système bancaire parallèle, forte interconnexion du système bancaire et des économies à l’échelle mondiale), avec quelles conséquences : sérieuses mais limitées, comme la « bulle Internet » de l’an 2000, ou considérables, comme en 1929 et 2008.
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En 2025, l’Association des éditeurs italiens (AIE) révèle que si le nombre de lecteurs en Italie croît (33,9 millions, soit 76 % de la population), le temps consacré à la lecture décline. Parallèlement, l’usage de l’intelligence artificielle (IA) s’impose dans l’édition : 75,3 % des maisons interrogées recourent à l’IA, un taux qui atteint 96,2 % chez les éditeurs réalisant plus de 5 millions d’euros de chiffre d’affaires. Les usages sont variés : métadonnées, communications, couvertures, relecture, traduction… À l’inverse subsistent d’importantes craintes sur le droit d’auteur, la qualité du contenu, les « hallucinations » des outils ou les conditions contractuelles.
Au Québec, le BiblioCLUB – initiative de l’Association des bibliothèques publiques du Québec (ABPQ) – sera de retour à l’été 2026, après un lancement en 2025 dans plus de cent bibliothèques. Gratuit et destiné aux 3-12 ans ainsi qu’à leurs familles, le programme met en avant la littérature québécoise et autochtone. Il propose lectures, animations, ateliers et activités ludiques pour encourager le goût du livre pendant les vacances. L’ABPQ espère ainsi ancrer le BiblioCLUB comme un rendez-vous annuel national, accessible et inclusif.
À Potsdam, un mémorial construit dans une ancienne cabine téléphonique, honorant les livres brûlés par les nazis en 1933, a été la cible d’un incendie. Ce lieu de mémoire dédié aux autodafés nazis – bûchers symboliques visant la pensée libre – a été profané par des adolescents : vitrines brisées, ouvrages incendiés, mémoire blessée. L’acte, attribué à un motif politique ou idéologique, choque : il rappelle combien la mémoire culturelle reste fragile face à la haine.
En octobre 2025, la police nationale a mis fin à des mois de vols discrets à la bibliothèque municipale de El Puerto de Santa María (Cadix). Une femme est suspectée d’avoir soustrait de nombreux livres qu’elle revendait ensuite sur l’application de seconde main Wallapop. Lors de l’enquête, les autorités ont récupéré 127 ouvrages, pour une valeur estimée à plus de 2 000 €. Disséminés un peu partout en Espagne – de Burgos à Madrid ou Barcelone –, les livres volés ont dû être localisés puis restitués, un travail compliqué tant le réseau d’acheteurs était vaste.
Aux États-Unis, les aides fédérales aux bibliothèques, assurées par l’Institute of Museum and Library Services (IMLS), viennent d’être rétablies. En mars 2025, un décret de Donald Trump avait ordonné la suppression de l’IMLS, entraînant la suspension des subventions et la mise en péril de services culturels et éducatifs. Mais, par décision de justice datée du 21 novembre 2025, le démantèlement a été jugé illégal, et l’IMLS a annoncé le 3 décembre la remise en place de tous les financements précédemment coupés. La mesure est saluée comme un « grand retour » pour les bibliothèques publiques, scolaires ou universitaires, dont les services – prêts, programmes éducatifs, accès élargi à la culture – peuvent reprendre.
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« Il y a de la vie sur la planète Mars » : le 9 décembre 1906, ce titre barre la une du New York Times sur toute sa largeur. En manchette : « Le prof. Percival Lowell, reconnu comme la plus haute autorité sur le sujet, déclare qu’aucun doute n’est permis : des êtres vivants habitent notre monde voisin ». Le sujet est d’actualité car dès la prochaine décennie, si l’on en croit Elon Musk, des astronautes pourront s’y rendre et sans doute vérifier que là-bas au moins, comme vient de lui lancer le ministre polonais des Affaires étrangères, « on ne censure pas les saluts nazis ». L’histoire est connue, mais vaut qu’on y revienne. Car c’est plus qu’une galéjade. Un astronome milanais ayant cru repérer des « chenaux » sur la planète rouge, ceux-ci devinrent (médias aidant) des canaux d’irrigation. Tant en Europe qu’aux États-Unis, des célébrités mais aussi de respectables savants en furent convaincus : des êtres intelligents y prospéraient. À l’épicentre de ce séisme sociétal figurent deux astronomes hauts en couleur, Camille Flammarion en France et, aux États-Unis, Percival Lowell, plus charismatique encore. « La fascination pour Mars reflétait un profond besoin culturel », écrit Dov Greenbaum en rendant compte dans Science du livre du journaliste scientifique David Baron. « En ce temps d’industrialisation rapide, de tensions globales et d’incertitude spirituelle, la planète rouge symbolisait les espoirs de l’humanité dans le progrès technologique et la possibilité d’une vie paisible et intelligente en dehors de la Terre. » C’était avant la Première Guerre mondiale. Dov Greenbaum juge « troublante » l’absence de réactivité des astronomes sérieux de l’époque ; si bien que le génial inventeur Nikola Tesla s’est lui-même laissé prendre à ce mirage. Il fallut les observations de nouveaux télescopes, au mont Wilson aux États-Unis et au pic du Midi en France, pour en finir avec ce mythe, en 1908 et 1909. Lowell, lui, resta accroché à sa croyance comme la bernique à son rocher.
[post_title] => Les Martiens existent ! En voici la preuve
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On ne souhaiterait pas ce sort à sa pire ennemie : nonne dans un couvent espagnol du XVIe siècle. Et pourtant… D’abord, l’espérance de vie des religieuses était certainement supérieure à celle de leurs consœurs dans le siècle, victimes, pour les plus favorisées, du joug conjugal et des grossesses à répétition souvent mortelles, et, pour les autres, des durs labeurs et de la faim en prime. Les dames pieuses, elles, menaient des vies bien souvent plus longues et comparativement plus confortables, mais surtout plus gratifiantes même en ne s’en tenant qu’aux aspects laïques. L’existence monacale n’était pas exempte de certaines séductions, dues à la vie en communauté et aussi à la possibilité d’une activité intellectuelle créative. Car le couvent offre d’abord un concentré de la vie en société – enfants et hommes exceptés (envers lesquels beaucoup de ces femmes, « qui ont quitté le monde pour vivre entre elles », comme le résume María Sánchez Díez dans le New York Times, expriment leur éloignement voire leur dégoût). Mais l’affection, la solidarité, l’amitié au besoin très poussée, sont par contre bien présentes, et aussi la gaîté, dont une mère supérieure vante ainsi les mérites : « Vous découvrirez par vous-mêmes que parfois, alors que vous êtes réticentes à aller en récréation parce que vous êtes tristes et mélancoliques, la joie et le bon esprit des sœurs vous distrairont de vos peines et les tourneront en bonheur ». Et puis – autre avantage – ces femmes généralement intelligentes et parfois très bien éduquées ont la possibilité et souvent même l’obligation de produire un journal « de l’âme » (pour leur confesseur) ou leur autobiographie ; elles sont aussi des communicatrices assidues, soucieuses de partager avec leurs consœurs éloignées leurs expériences spirituelles et temporelles.
Il subsiste un amas de tels textes, dont deux thésardes de Brown University à Rhode Island se sont emparées et contre toute attente ont fait leur miel. Elles ont en effet découvert dans l’étonnant matériau « des voix incroyablement proches […] qui amènent à l’étrange constatation que la sagesse conventuelle du XVIe siècle peut apporter une réponse apaisante aux malaises des jeunes femmes du XXIe ». L’« intelligence collective » qui émerge sous la plume des nonnes de jadis montre en effet comment supporter et gérer la soumission pénible à une hiérarchie masculine accrochée à ses doctrines et ses privilèges ; ou résoudre les inéluctables problèmes d’argent avec une sagacité financière redoutable (comme Thérèse d’Avila) et un pragmatisme qui permet d’alimenter les caisses des couvents par des petits business : fabrication d’hosties ou de vêtements religieux, monétisation des extases spectaculaires de certaines nonnes (notamment les lévitations de Thérèse d’Avila, la « superstar du mysticisme », celles, « statiques », de Maria de Jésus de Agreda, ou les « extases de pleurs » de quelques autres), et même la production de romans comme ceux de la sœur Arcangela Tarabotti. Il est aussi beaucoup question d’amour, qu’il s’agisse d’amitié superlativement exaltée ou des relations très charnelles décrites dans les comptes rendus de procès d’inquisition, notamment celui d’Inés de Santa Cruz et de Catalina Ledesma qui contient les aveux très détaillés des deux pécheresses. Le jésuite Bernardo de Villegas, auteur d’un « Guide de conduite pour les fiancées du Christ », y soulignait le danger inhérent des « amitiés particulière » : trop de bavardages, trop d’émotions, trop de jalousies qui parfois se transforment en haine, trop de favoritisme… Thérèse d’Avila était elle-même très stricte sur la question, mais elle écrivait aussi « que seules les femmes savent parler le langage des femmes ».
C’est sans doute pourquoi les deux autrices ont été happées par ces paroles venues de si loin mais qui leur ont paru s’appliquer si pertinemment à elles-mêmes et à leurs problèmes de nonnes modernes (c’est-à-dire des thésardes), écrasées de travail souvent ingrat, affrontées à une hiérarchie masculine et oppressante, enfin confrontées aux mêmes vicissitudes des amours lesbiennes que leurs prédécesseures, Sainte Inquisition en moins. Ce qui a conduit nos deux universitaires, sur les conseils intéressés de leur éditeur, à transformer leur savante étude en un véritable guide de self-help pour demoiselles qui a le mérite additionnel de montrer que l’éternel féminin transcende en effet les siècles comme les circonstances.
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Militante de l’organisation Montoneros pendant les années 1970, Pilar Calveiro fut arrêtée par la dictature militaire argentine en 1977, illégalement détenue (officiellement « disparue ») pendant un an et demi dans plusieurs centres clandestins de détention. Avec De matar a dejar morir, la politologue argentine, exilée au Mexique depuis 1979, prolonge et radicalise sa réflexion entamée il y a près de trente ans sur les disparitions de la dictature argentine (Pouvoir et disparition, La Fabrique, 2006). Son nouvel essai analyse une mutation : autrefois orchestré par des États forts, le dispositif de disparition des personnes est désormais lié à des États fragmentés, infiltrés par des réseaux privés et criminels.
Calveiro y explore les mécanismes actuels de la biopolitique – ces stratégies de pouvoir qui ne tuent plus directement, mais décident quelles vies méritent protection et quelles vies peuvent être abandonnées, laissées à une mort lente ou vouées à la disparition. S’inspirant de Walter Benjamin et de ses « avertissements d’incendie », elle décrit aussi un monde en proie à des catastrophes écologiques, sociales et politiques imminentes, où la pandémie a accéléré une gestion différentielle des existences : qui protéger ? Qui sacrifier ?
Comme le soulignait Hannah Arendt analysant le totalitarisme, « la disparition du social est au cœur des intentions de certains gouvernements actuels, surtout de ces nouvelles droites » insiste Pilar Calveiro dans son introduction, reproduite sur le portail argentin elDiarioAR. Elle met en lumière l’importance des résistances locales. Portées par des communautés indigènes, des mouvements autonomes ou des collectifs urbains, ces alternatives marginales mais vitales agissent comme des « contre-feux » pour préserver la diversité des vies et s’opposer à la destruction systématique du lien social et de la nature.
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