Books et Facebook
Publié dans le magazine Books n° 16, octobre 2010. Par Olivier Postel-Vinay.
Un peu avance sur le beaujolais, le Books nouveau est arrivé. Il change d’habits, mais le moine est le même. Le format se prête mieux à la mise en place en kiosque et en librairie. Il pose toujours un problème pour certains sacs à main, mais facilite la lecture au lit et dans les transports. Et favorise la conservation de la collection (contrairement au beaujolais, les saveurs de Books gagnent à vieillir). Sur l’essentiel, le concept ne change pas. L’idée est toujours d’éclairer notre lanterne en nous appuyant sur les livres récents ou moins récents parus à travers la planète (y compris en France) et sur les meilleurs articles que nous trouvons à propos de ces livres. Nous faisons désormais deux petites entorses à la règle : nous demandons à un auteur étranger de commenter un livre français qui fait débat et, le cas échéant, publions un article exceptionnel non directement lié à un ouvrage. Autre innovation, nous étendons notre veille sur les traductions récentes en français.
Le dossier sur Facebook et les réseaux en ligne est fidèle à notre ambition. Nous donnons à penser sur un sujet aussi important que difficile à analyser. Comment expliquer qu’un milliard d’êtres humains aient pris la peine de se créer une page personnelle pour communiquer sur Internet ? Quelle est la signification, quelle est la portée d’un tel phénomène ?
D’une certaine façon, Books est antinomique de Facebook. Le réseau en ligne favorise le contact facile, l’immédiateté, l’impulsivité, la réaction à fleur de peau. Il contribue davantage au renforcement des préjugés et des idées de chacun qu’à leur remise en cause. Books est une invitation à la lenteur réflexive, à la prise de distance. C’est une autre forme de plaisir. Nous avons quelques points communs, cependant. Notre jeunesse, d’abord. Comme le succès de Facebook, celui de Books (toutes proportions gardées !) nous dit quelque chose sur notre temps. La fidélité à Books témoigne aussi du sentiment d’appartenir à une certaine communauté d’esprits. Or Facebook est un agrégat de communautés d’esprits. D’où notre point commun le plus évident : notre désir d’avoir beaucoup d’amis.