Au centre du débat : le comportement des femmes
Publié dans le magazine Books n° 122, novembre-décembre. Par Hervé Le Bras.
À moins que les guerres se répandent en Afrique et au Moyen-Orient, la décrue de la population mondiale devrait commencer un peu avant 2070, donc plus tôt que le projettent les experts de l’ONU. Ceux-ci sous-estiment les progrès de l’éducation des filles et de l’indépendance des femmes et surestiment l’évolution de l’espérance de vie. Leurs projections sont aussi influencées par des considérations de nature politique.
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La capacité procréatrice de l’espèce humaine est prodigieuse. Parmi les championnes, les femmes de la secte protestante des huttérites, qui engendraient en moyenne 9,7 enfants – et 12,3, pour celles qui se mariaient avant 20 ans. Au cours du XXe siècle, leur population a doublé tous les vingt ans. Les femmes mariées québécoises vivant à la campagne n’étaient guère en reste, elles qui donnèrent naissance en moyenne à 9,9 enfants durant les années 1940. Les Kényanes avaient 8 enfants dans les années 1960 et les Nigériennes en ont actuellement presque 7. Le record des huttérites à 12,3 enfants a été baptisé « fécondité naturelle » par les démographes, naturelle parce qu’en dehors de tout contrôle social ou individuel.
Malgré de telles performances, la population humaine a augmenté très lentement depuis son apparition jusqu’à une date récente. On estime à 1 million le nombre d’hommes sur Terre avant l’avènement de l’agriculture (en moyenne, un chasseur-cueilleur a besoin de 10 km2 pour survivre dans...