Publié dans le magazine Books n° 53, avril 2014. Par Tim Flannery.
Pendant 500 millions d’années, ces bestioles parmi les plus primitives ont semblé se tenir tranquilles. Depuis quelques décennies, effet de la surpêche et autres interventions humaines, elles pullulent. D’une résistance et d’une voracité hallucinantes, ces prédatrices parfois mortelles pour l’homme font chavirer les chalutiers, détraquent les porte-avions et les centrales nucléaires, paralysent des économies entières. Et sont peut-être en train de détruire à jamais l’écosystème marin.
La mode est aux aquariums à méduses. Derrière la vitre, ces créatures offrent un spectacle formidablement relaxant, d’une beauté hypnotique. Le reste du temps, on ne leur prête généralement guère d’attention – jusqu’au jour où l’on se fait piquer. Les blessures de méduses ne sont souvent qu’un épisode un peu douloureux de vacances sans histoire à la mer. Sauf si l’on vit dans le nord de l’Australie : là, le nageur court le risque de se faire piquer par la créature la plus venimeuse du monde, la cuboméduse
Chironex fleckeri.
Cette variété se reconnaît à son ombrelle (le disque qui lui tient lieu de « tête ») de 30 centimètres de diamètre environ, derrière laquelle traînent des tentacules pouvant mesurer jusqu’à plus de 160 mètres. C’est là que se trouvent les cellules urticantes. Si votre peau entre en contact avec 5 mètres de tentacule seulement, vous n’aurez plus en moyenne que quatre minutes à vivre, parfois deux. En Australie, depuis 1884, soixante-seize décès dus aux cuboméduses ont été recensés ; mais il est probable que beaucoup d’autres n’...