Publié dans le magazine Books n° 83, mai / juin 2017. Par William Dalrymple.
En 1947, quelques heures seulement après le départ des Britanniques, le sous-continent indien s’embrase. La naissance de l’Inde et du Pakistan s’accompagne de massacres d’une violence inouïe et d’un exode sans précédent. Soixante-dix ans plus tard, la géopolitique de l’Asie de Sud en garde encore les séquelles.
En août 1947, lorsque les Britanniques quittent enfin l’Inde après trois cents ans de présence, le sous-continent est divisé en deux États-nations indépendants : l’Inde, majoritairement hindoue, et le Pakistan, majoritairement musulman. Commence alors l’un des mouvements de population les plus importants de l’histoire de l’humanité : des millions de musulmans se mettent en route vers le Pakistan occidental et le Pakistan oriental (qui correspond au Bangladesh actuel), tandis que des millions d’hindous et de sikhs entreprennent le trajet inverse. Des centaines de milliers d’entre eux n’arriveront jamais à destination.
Des communautés qui ont coexisté près de mille ans s’affrontent soudain dans une explosion de violence religieuse qui oppose hindous et sikhs d’un côté et musulmans de l’autre. Un génocide mutuel totalement imprévu car sans précédent. C’est au Pendjab et au Bengale, respectivement limitrophes du Pakistan occidental et oriental, que se déroulent les pires atrocités – massacres, incendies, conversions forcées, enlèvements massifs, agressions sexuelles féroces. Quelque 75 000 femmes sont violées, nombre d’entre elles défigurées ou mutilées. « Des bandes de tueurs mettent le...