Publié dans le magazine Books n° 74, mars 2016. Par Eamonn Gearon.
Ils représentent 1 à 2 % de la population tout au plus, mais sont souvent stigmatisés, comme l’a encore illustré récemment l’appel de Donald Trump à interdire le territoire à tout musulman. L’islam est pourtant présent dans le pays depuis l’esclavage. Et il s’y est parfaitement acclimaté, donnant naissance à des variantes typiquement américaines. La peur de la déloyauté de cette population discrète relève du fantasme.
L’islam est aujourd’hui une religion américaine au même titre que le protestantisme sous ses différentes formes, le catholicisme, le bouddhisme, le judaïsme ou l’animisme des tribus indiennes. Et cette réalité est admise depuis plus longtemps qu’on ne l’imagine. En 1784, quand on lui demanda quel genre d’ouvriers devaient être recrutés pour l’entretien de sa propriété de Mount Vernon, George Washington répondit : « Si ce sont de bons ouvriers, ils peuvent bien venir d’Asie, d’Afrique ou d’Europe ; ils peuvent être mahométans, juifs, chrétiens de toute obédience, ou même athées. »
La plupart des croyants se représentent Dieu comme un être immuable ; les fidèles et leurs religions, eux, ne le sont pas. Ils évoluent au gré des circonstances propres à leur temps et au lieu où ils vivent. L’islam ne fait pas exception à la règle, et les individus qui s’en réclament composent une palette aussi variée que ceux qui se revendiquent des autres traditions, abrahamiques ou pas. Pourtant, bien des non-musulmans se figurent que l’islam se meut dans une sorte de dimension parallèle,...