Requinquer le quatrième pouvoir
Publié en mars 2011. Par Olivier Postel-Vinay.
Quand une question d’actualité est un peu complexe, j’ai tendance à me contenter de passer vite sur les articles de mon quotidien préféré et à attendre l’arrivée de The Economist. Même sur les sujets français. Ce n’est pas anecdotique. Les quotidiens traversent la crise la plus grave de leur histoire – du moins si l’on fait commencer cette histoire au moment, variable selon les pays, où les meilleurs d’entre eux ont incarné l’éthique imposée en France par Beuve-Méry, quand il lança Le Monde, à la Libération. Une éthique bien résumée récemment par Daniel Vernet dans un mensuel américain : le souci de rigueur, la préférence donnée aux faits, la méfiance à l’égard des commentaires à chaud et des opinions partisanes, la défiance à l’égard des lobbies de toute nature (1).
Avec quelques autres, j’en viens à me demander si une solution à la crise n’est pas à rechercher du côté de l’abandon de l’attachement au rythme quotidien de la presse de qualité. Nous en avons l’expérience : un jour de grève est pain béni, tant il garantit une plus grande richesse de contenu le jour suivant. Peut-être faudrait-il essayer de transformer les meilleurs quotidiens en des journaux du deuxième jour. Une parution trois fois par semaine, le mardi, le jeudi et le samedi, par exemple, inciterait les rédactions (certes réduites) à prendre un peu de recul et, de ce fait, à mieux satisfaire la demande croissante du lectorat pour plus de pertinence et de sérieux.
A l’heure d’Internet, la recherche de la pertinence me paraît l’atout maître, tant du point de vue économique (la diffusion de The Economist ne cesse de progresser) que pour la sauvegarde et l’approfondissement de l’idée démocratique.
(1) France Pressed, The American Interest, mars-avril 2011.