L’étrange empire de la Légion
Publié dans le magazine Books n° 34, juillet-août 2012. Par Max Hastings.
En permettant à des hommes en rupture de ban de se défaire de leur identité en échange d’un engagement aveugle, la Légion a forgé sa légende. Mais la réalité de ces « képis blancs », en première ligne de toutes les aventures militaires coloniales et néocoloniales françaises, est faite de masochisme plus que de romanesque.
Le monde compte plus de désaxés, de sadiques, de masochistes et de têtes brûlées que nous ne voudrions parfois le croire. Comment expliquer, sinon, que la Légion étrangère française recrute bien au-delà de ses besoins (1) ? À une époque où la plupart des armées du monde s’efforcent de faire du métier militaire une expérience moins barbare et plus évoluée que par le passé, la Légion demande toujours à ses hommes de récurer les sols comme des forcenés, de ranger fourniment et uniformes avec un soin obsessionnel et de marcher, marcher, marcher.
Sa culture n’a guère changé depuis le début des années 1900, quand Erwin Rosen, une recrue allemande, écrivait : « On ne cesse de seriner au légionnaire qu’il n’a d’autre mission en ce monde que de marcher. Son estomac crie famine, une soif brûlante lui dessèche la langue ? Tant pis pour lui, ce n’est pas une raison pour s’arrêter de marcher ! Peu importe qu’il soit fatigué, exténué, au bord de l’épuisement – il ne doit pas interrompre sa marche. Ses chevilles saignent, il a...
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