Publié dans le magazine Books n° 42, avril 2013. Par Larry Squire.
Il fallait le faire : pour explorer les méandres de la mémoire humaine, décortiquer les neurones d’une limace de mer. L’exploitation systématique de cette idée géniale valut à son auteur le prix Nobel.
Dans les années 1950 et au début des années 1960, les neurosciences n’étaient pas encore une discipline cohérente et n’étaient pas enseignées à l’université. La psychologie était encore sous l’influence dominante du behaviorisme et les sciences cognitives émergeaient tout juste. La question de savoir comment le cerveau organise des processus aussi fondamentaux que l’apprentissage et la mémoire suscitait un intérêt considérable, mais la fusion entre psychologie et biologie qui allait donner naissance aux neurosciences n’avait pas encore eu lieu. On savait déjà beaucoup de choses sur la physiologie des cellules nerveuses et des synapses, mais l’étude des fonctions complexes associées à la mémoire restait embryonnaire.
C’est alors que les choses commencèrent de changer. En 1957, Brenda Milner, neuropsychologue à l’université McGill, décrivit les effets sélectifs sur la mémoire d’une atteinte au lobe médio-temporal, chez un patient connu sous le nom de H. M. Ces observations montrèrent que l’acquisition de nouveaux souvenirs est une fonction cérébrale distincte, séparée de nos facultés perceptives et cognitives. Grâce à la mise au point d’un modè...