Censure des universités américaines : que dira la Cour suprême ?
Publié en avril 2025. Par Books.
La campagne menée par l’administration Trump contre les universitaires et les universités qui lui déplaisent va donner lieu à des débats judiciaires, lesquels vont forcément remonter un jour ou l’autre à la Cour suprême. Peut-on anticiper la manière dont celle-ci va trancher ? Éminent professeur de droit à Yale, considéré comme conservateur, Keith Whittington pose la question en examinant notamment le Stop WOKE Act voté par le parlement de Floride, qui interdit aux professeurs de l’université d’État de promouvoir certaines idées dans leurs cours. Au nombre de huit, ces idées sont associées par les trumpistes à la théorie critique de la race, explique le juriste de gauche David Cole en rendant compte du livre de son collègue dans les colonnes de la New York Review of Books. Par exemple, l’idée « qu’une personne, en vertu de sa race, de sa couleur, de son origine nationale ou de son sexe soit discriminée ou fasse l’objet d’un traitement défavorable au nom de la diversité, de l’équité ou de l’inclusion ».
Le conservateur Whittington est catégorique : il n’appartient pas au pouvoir politique de se mêler de ce que dit un professeur d’université dans ses cours, tant que ce que ses propos rentrent dans les « standards » de son magistère reconnus par la tradition. L’intervention des trumpistes dans ce domaine relève de « tentatives politiques d’empêcher le public d’entendre des idées que les politiciens au pouvoir n’apprécient pas ».
Les États-Unis ont connu semblable expérience durant la guerre froide, relève Cole, et la Cour suprême a été saisie. « Mais après avoir d’abord cautionné certaines attaques contre des universités, elle a finalement pris fermement position pour défendre la liberté académique. » Il cite un écrit significatif du Chief Justice William Rehnquist, considéré comme particulièrement conservateur, qui a occupé la présidence de la Cour suprême de 1986 à 2005 : « L’université est une sphère traditionnelle de la libre expression si fondamentale pour le fonctionnement de notre société que la faculté de l’Administration de contrôler le discours tenu au sein de cette sphère en posant des conditions à l’octroi de fonds publics est limitée par les doctrines aussi vagues qu’extensives du Premier amendement ».