La déesse Tyché dans votre poche
Publié dans le magazine Books n° 121, septembre-octobre 2022. Par Mary Beard.
Nous ne sommes pas les premiers à rapporter de vacances de petites reproductions de monuments. Un vaste commerce de souvenirs – gobelets en verre décorés du phare d’Alexandrie, plats en cuivre représentant le mur d’Hadrien, etc. – existait déjà à l’époque de l’Empire romain. Mais ces objets n’avaient peut-être pas la même signification qu’aujourd’hui.
En novembre 130, l’empereur romain Hadrien, accompagné de son épouse Sabine, d’amis, d’esclaves et probablement d’un détachement de gardes armés, se rendit sur le site de l’une des plus grandes attractions touristiques de l’Antiquité. Il s’agissait de deux statues pharaoniques de près de 20 mètres de haut qui se dressent aujourd’hui encore aux abords de la cité égyptienne de Louxor, et qui avaient déjà 1 500 ans lors de la visite de l’empereur. Hadrien ne s’intéressait pas tant à leur ancienneté qu’à leur caractère miraculeux. Il se trouve que par l’effet combiné d’une fissure dans la pierre et de la chaleur du soleil levant, l’une des statues émettait parfois un sifflement, comme si elle chantait. Personne n’a apporté d’explication totalement convaincante à ce phénomène, et certains observateurs de l’époque ont même soupçonné que « des garçons cachés derrière » et équipés d’instruments rudimentaires n’y étaient pas étrangers. Mais, quelle qu’ait été l’origine de ce son, la statue a cessé d’émettre le moindre...