L’arme économique, un pétard mouillé ?
Publié dans le magazine Books n° 121, septembre-octobre 2022. Par Max Harris.
Les sanctions économiques sont-elles réellement efficaces ? Dans les années 1920, on les pensait capables de dissuader toute velléité d’expansion territoriale. Elles n’empêchèrent pourtant pas le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Un historien affirme même que leur usage timide précipita le conflit.
« Les stylos semblent être des instruments tellement plus propres que les baïonnettes », raillait William Arnold-Forster en 1920. Pendant la Première Guerre mondiale, un fonctionnaire de Whitehall, à Londres, pouvait gratter du papier toute la journée, puis se rendre au Savoy pour dîner dans son uniforme élégant, à mille lieues de l’horreur des tranchées. Mais, pour avoir été chargé d’organiser le blocus de l’Allemagne par les Alliés, Arnold-Forster savait que, même si sa veste restait immaculée, son stylo faisait verser plus de sang que n’importe quel fusil. Le blocus qu’il aida à concevoir généra une famine de masse causant des centaines de milliers de morts. Selon la logique impitoyable de la guerre totale, il s’agissait de « faire regretter à l’ennemi que ses enfants aient jamais vu le jour ».
Tout en ayant bien conscience de la terrible réalité du blocus, Arnold-Forster ne prônait pas l’abolition de la guerre économique. Au contraire, il pensait que cet instrument offrait un espoir pour le monde d’après-guerre&...