13 ans pour une BD monstre
Publié en mai 2024. Par Books.
Ce printemps, l’ouvrage d’Anke Feuchtenberger, Genossin Kuckuck, a manqué de peu d’entrer dans l’histoire des lettres allemandes. Nominé pour le prix de la Foire du livre de Leipzig, il aurait pu devenir la première bande dessinée à remporter cette récompense, l’une des plus prestigieuses du pays. Ce ne fut pas le cas. Qu’importe : cette simple nomination a suffi à attirer sur « Camarade Coucou » l’attention d’une presse d’ordinaire bien moins prolixe sur le neuvième art que la presse française. Süddeutsche Zeitung, Frankfurter Rundschau, Frankfurter Allgemeine Zeitung, Tageszeitung, site de la radio publique Deutschlandfunk, Arte, les articles et reportages, en général élogieux, se sont multipliés. Voici, par exemple, comment, dans le Süddeutsche Zeitung, Martina Knoben présente ce roman graphique « de près de 450 pages, souvent sombres et inquiétantes, mais toujours belles comme des contes de fées » : « une œuvre sauvage dans laquelle l’auteure raconte une enfance et une adolescence en RDA, des années 1960 à la privatisation de la propriété du peuple dans les années 1990 – mais pas de manière linéaire ou avec une histoire logiquement compréhensible. Plutôt comme dans un rêve. Des fragments émergent, qui relient le personnel au politique, le ressenti, l’émotion, l’irréel aux éclats d’histoire. » Et de rappeler qu’Anke Feuchtenberger « a travaillé plus de treize ans à ce livre gigantesque », principalement au crayon et au fusain, souvent en noir et blanc, à l’occasion aussi en rouge, pour les chapitres « violents et cruels ».