Publié dans le magazine Books n° 67, juillet - août 2015. Par Manfred Kriener.
Quelle épopée que celle du hamburger ! Sans doute né du dégoût des émigrants allemands voguant vers l’Amérique pour le brouet servi à bord, il sera, au terme du voyage, transformé en infâme produit industriel fabriqué à la chaîne. Mais l’histoire continue. Tandis que les ventes de McDonald’s reculent, les gourmets du monde entier récupèrent en le réinventant le sandwich le plus vendu et le plus mal famé du monde.
Au Prince Charles, dans le quartier de Kreuzberg, à Berlin, les grils fument et les basses vrombissent. C’est là qu’ont lieu les plus fameux « Burger & Hip-Hop »
[soirées où l’on danse et mange des hamburgers jusqu’au bout de la nuit] de la ville. Ces soirées s’inscrivent dans un nouveau mouvement culinaire qui entend élever le hamburger au rang de mets délicat, en en l’accompagnant de fromage de chèvre, de tortilla chips ou de kimchi coréen. Ces burgers pour gastronomes connaissent une telle vogue qu’on a vu se développer de véritables chaînes comme Schiller-Burger ou Hans im Glück.
L’ingrédient principal, lui, n’a pourtant pas changé : le bœuf haché reste du bœuf haché. Et la tour de deux à quatre étages composée de moitiés de petits pains, de tranches de viande et de giclées de sauce, avec une feuille de salade et une lamelle de cornichon pour se donner bonne conscience, est elle aussi toujours la même. Quel que soit l’angle sous lequel on envisage la chose, l’ensemble forme bien un hamburger, ce pilier de...