Les 32 heures, et pourquoi pas la Saint-Lundi ?
Publié le 14 octobre 2015. Par La rédaction de Books.
La CGT réclame le passage aux 32 heures. Ce n’est pas encore la semaine de travail de 15 heures prédite par Keynes, ni même la semaine de quatre jours, mais cela s’en rapproche. Si l’on en croit les travaux de l’historien britannique Edward P. Thompson, une telle mesure permettrait presque de renouer avec la tradition. Jusqu’au début du XXe siècle, beaucoup de professions disposaient d’un emploi du temps très souple, leur permettant notamment de vénérer comme il se doit la Saint-Lundi, rappelle-t-il dans Temps, discipline du travail et capitalisme industriel. Du fabriquant de chaussures, à l’imprimeur, en passant par le potier ou le coutelier, tous respectaient le lundi chômé. « La Saint-Lundi semble avoir été honorée quasiment partout où ont existé des activités à petite échelle, domestiques ou effectuées à domicile », écrit l’historien, citant le Mexique, la France, la Belgique, la Suède ou encore la Prusse. Cette tradition, qui chez certains s’étendait au mardi, fut parfois perpétuée dans les manufactures et l’industrie lourde. On en trouve encore trace dans l’Angleterre du début du XXe siècle.
Certains patrons s’arrangeaient pour faire du lundi le jour de l’entretien des machines. Pour le travailleur, c’était une journée consacrée aux affaires personnelles. En France, « le dimanche est le jour de la famille, le lundi, celui de l’amitié », souligne Thompson en citant La Vie ouvrière en France sous le Second Empire de George Duveau. Mais à mesure qu’avance le XIXe siècle, la Saint -Lundi devient le privilège des artisans les mieux payés et l’une des bêtes noires de la bonne société victorienne : l’observation de ce jour chômé est accusée de favoriser l’alcoolisme et l’oisiveté des classes laborieuses ; il convient donc de les remettre au travail, le lundi comme les autres jours.