Le viol de l’Ukraine
Publié dans le magazine Books n° 28, décembre 2011 - janvier 2012.
« Ce livre dit la tragédie d’une féministe violée par un homme lui-même violé par l’Empire, et qui est pour cette raison incapable d’aimer une femme sans abuser d’elle. » Ces agressions sont métaphoriques, explique le quotidien ukrainien Den : ils font référence à l’âme ravagée de la narratrice du roman d’Oksana Zaboujko, une belle et jeune poétesse vivant sous le joug d’un amant sadique…
« Ce livre dit la tragédie d’une féministe violée par un homme lui-même violé par l’Empire, et qui est pour cette raison incapable d’aimer une femme sans abuser d’elle. » Ces agressions sont métaphoriques, explique le quotidien ukrainien Den : ils font référence à l’âme ravagée de la narratrice du roman d’Oksana Zaboujko, une belle et jeune poétesse vivant sous le joug d’un amant sadique, et au combat de celui-ci contre la domination culturelle et politique de son pays par le voisin russe. Paru au milieu des années 1990, au lendemain de l’indépendance, ce long monologue sur la sexualité, écrit par une femme, a connu un succès phénoménal. Les critiques en ont fait un emblème à la fois féministe et national. L’héroïne se donne à son amant, explique Lev Danilkine du magazine russe Aficha, parce qu’il incarne à ses yeux un « Ukrainien vainqueur, qui a toujours défendu sa nation et sa langue. Le sexe est pour l’héroïne une façon de se préserver en dépit des calamités de l’histoire, c’est un acte à la fois charnel et spirituel, l’instinct d’un peuple ».