La révolution sexuelle de Luther
Publié le 18 février 2016. Par La rédaction de Books.
Le mariage de Luther / Cronau
Le 18 février 1546 mourait Martin Luther, qui avait passé une bonne partie de sa vie à condamner, notamment, la marchandisation de l’Eglise. Outré par le commerce des indulgences, le fondateur du protestantisme l’était également par celui des corps, via le sacrement du mariage. Dans Luthers’s Fortress, l’historien James Reston rappelle que Luther avait particulièrement en horreur le célibat, « qui nous livre à des feux dévorants et des idées impures ». Cela valait en particulier pour celui des religieux, qui crée à ses yeux la division, la tentation, la honte, le péché, le scandale et est donc l’œuvre du diable. Lui-même ancien moine épousera une nonne, dont il aura six enfants.
Mais si le mariage est un gage de félicité et une institution divine, il n’est pas à ses yeux un sacrement. Lequel est d’abord un mystère, un signe visible de grâce spirituelle qui émane de Dieu et non des hommes. Les « honteuses » lois humaines exaltant le mariage transforment ainsi les prêtres en marchands « qui vendent des vulves et des pénis » par cupidité et impiété, s’indigne Luther. Pour lui, l’amour n’a pas besoin de lois. Et l’Eglise est malvenue d’en inventer. « Est-ce que le pape fait les lois ? Qu’il les fasse pour lui-même et qu’il ne touche pas à ma liberté », écrit-il.
Puisant des arguments dans la Bible, il dénonce également l’interdiction du divorce. Il n’est pas pour autant favorable à cette solution, à laquelle il préfère la bigamie. Pour les hommes comme pour les femmes. Il conseille ainsi aux épouses de maris impuissants de prendre un autre homme, avec l’assentiment de leur compagnon, les enfants de cette union devant être considérés comme des héritiers légitimes. « La femme est libre, de par la loi divine, et on ne peut l’obliger à réprimer ses désirs charnels, écrit Luther. Son mari doit donc lui concéder ce droit et céder à quelqu’un d’autre l’épouse qui n’est sienne qu’en apparence. »