Un monde de moins en moins violent ?
Publié le 16 décembre 2015. Par La rédaction de Books.
Si les condamnations pour violences ont augmenté de manière spectaculaire ces dix dernières années, cela ne signifie pas que la France soit devenue un pays plus violent. Les magistrats font simplement preuve d’une plus grande sévérité, assure l’Observatoire national de la délinquance. Le monde dans son ensemble tolèrerait de moins en moins la souffrance et la brutalité. C’est la thèse controversée développée par le professeur de psychologie Steven Pinker dans The Better Angels of our Nature. Mark Micale la discute dans cet article du Times literary supplement, traduit par Books en décembre 2012.
Pavé de plus de 800 pages imprimées serré, The Better Angels of Our Nature est une analyse audacieuse et admirablement synthétique de l’évolution de la nature de la violence, et de son niveau, au cours de l’histoire humaine, de la préhistoire à nos jours [lire « Vers la fin de la violence ? », Books, février 2012 et, la critique de Michel André, « Un monde de moins en moins violent ? »]. Professeur de psychologie à Harvard, Steven Pinker a produit en un quart de siècle toute une série d’ouvrages ambitieux, très bien informés mais aussi de lecture aisée, sur nos facultés mentales, principalement du point de vue de la psychologie évolutionnaire darwinienne. Il y révèle un talent pour la vulgarisation scientifique et un penchant pour le recueil de quantité de données disparates qu’il assemble en d’impressionnants – et parfois extravagants – édifices. Dans son dernier livre, le Canado-Américain expose la thèse suivante : contrairement au sentiment que produit l’intérêt obsessionnel des médias pour les informations sensationnelles, la violence connaît – et depuis un bon moment – un déclin spectaculaire dans le monde des humains. Au cours des derniers millénaires, les homicides, les agressions criminelles, les victimes de guerre, les violences domestiques, la maltraitance des enfants, la peine capitale, les lynchages et les viols sont devenus moins fréquents. Toutes sortes de pratiques horribles – torture, combats de gladiateurs, hérétiques condamnés au bûcher, supplice de la roue, goudron et plumes, châtiments corporels pour les enfants – ont été soit entièrement abolies, soit remplacées par des pratiques plus modérées. Pinker tente d’étayer son argument d’un flot de données statistiques et de plus d’une centaine de graphiques.
Il se retient de proposer un modèle global de la nature humaine, qu’il soit biologique, psychologique ou philosophique. Et ne reprend à son compte aucune des théories de l’agressivité humaine, comme l’idée de Konrad Lorenz selon laquelle une pulsion belliqueuse innée présente un avantage évolutif, ou le concept freudien d’une sublimation de l’agressivité destructrice dans l’œuvre constructive de la civilisation (1). Il évite aussi de prendre parti dans le débat vieux de plusieurs générations, qui oppose déterminisme biologique et environnementalisme culturel [lire à ce sujet l’article de Johan van der Dennen]. En fait, Pinker s’abstient soigneusement d’employer même des termes aussi élémentaires que « pulsion », « instinct » et « inné », probablement parce qu’il ne veut pas enliser son argument central dans les vieilles polémiques qui divisent les spécialistes des sciences humaines. Il cherche plutôt à narrer le long processus de pacification grâce auquel l’ampleur et l’intensité de la violence, dans ses mille manifestations, ont diminué régulièrement.
Il ressort de la lecture de ce récit que Pinker est une sorte de dualiste : à ses yeux, les hommes possèdent à la fois une agressivité profondément enracinée en eux et une étonnante capacité d’action constructive dans un large éventail d’activités. De l’interaction cruciale de ces facultés constructives et destructrices découle l’histoire de la civilisation humaine. Les passages les plus intéressants du livre identifient ces forces non-violentes qui, selon lui, sont de plus en plus opérantes : nos admirables dons pour l’empathie, la maîtrise de soi, la pensée rationnelle et la coopération sociale ont nourri le recul historique de la violence. Pinker postule que ces forces se sont combinées à un « processus de civilisation » d’ensemble (2) et, plus récemment, à une « féminisation » de la société, pour continuer à faire progresser le contrôle de soi. Deux grands mouvements historiques – tous deux nés en Europe et en Amérique du Nord mais qui irradient vers le reste du monde – ont codifié et encouragé le rejet progressif des pratiques violentes. Ces mouvements sont la « révolution humanitaire » des Lumières, au XVIIIe siècle, avec sa critique systématique de la torture, de l’incarcération politique et de la persécution religieuse, et la « révolution des droits » dans la seconde moitié du XXe siècle, qui s’est traduite par la reconnaissance juridique et sociale des Noirs, des femmes, des enfants et des homosexuels. Tout ce processus est sous-tendu par la propagation de l’instruction et le développement des visions multiculturelle et cosmopolite, encourageant la coexistence pacifique entre les peuples.
Le calcul cynique des médias
Pinker remarque un autre signe éloquent de cette régression bienvenue de la violence. Quantité d’actions qui provoquent la douleur, mais n’attiraient jadis ni l’attention ni la désapprobation, sont de plus en plus réprouvées : brutalités entre écoliers, fessées et maltraitance d’enfants, harcèlement sexuel sur le lieu de travail et mauvais traitements réservés aux animaux, par exemple. Paradoxalement, la formulation même du concept de « crimes de haine » indique une sensibilité nouvelle, une intolérance envers ces types de comportement. Selon l’auteur, cette évolution cachée mais essentielle se reflète jusque dans des tendances comme l’essor du végétarisme et le déclin de la chasse.
Bien entendu, j’espère que Pinker a raison. The Better Angels of Our Nature apporte le démenti dont nous avons désespérément besoin face aux journaux télévisés, qui nous jouent au quotidien le mauvais tour de se focaliser sur les conflits et les affrontements partout dans le monde pour les projeter instantanément dans nos foyers avec un réalisme sans cesse croissant. Selon le calcul cynique des médias, les images de violence et de destruction sont les plus à même d’attirer des téléspectateurs (« il faut que ça saigne »). Néanmoins, la vision optimiste de Pinker me met mal à l’aise et finalement ne me convainc pas. Contrairement aux ouvrages antérieurs de notre auteur, ce livre est historique plutôt que scientifique, et c’est là que le bât blesse. The Better Angels of Our Natureprouve à la fois les charmes et les risques des synthèses qui balaient le passé trop largement.
Sur le plan méthodologique, le projet de comparer et quantifier tous les types de violence humaine dans toutes les civilisations du monde au cours des sept derniers millénaires est chimérique. En tant que motion de confiance envers l’humanité, l’entreprise de Pinker est certainement louable, mais, comme lecture du passé de notre espèce, elle est simplificatrice.
Pour bâtir son argumentation, il mobilise une quantité stupéfiante de données. Néanmoins, je doute fort qu’aucun des types d’hostilité humaine qu’il évoque – suicides, victimes de la guerre, meurtres, femmes battues, exécutions des criminels – dispose du genre de source stable et cohérente nécessaire à l’établissement d’une mesure statistique fiable à l’échelle universelle, sur le long terme. La compilation systématique de données statistiques par les États n’a commencé qu’au milieu du XIXe siècle, et encore, dans une poignée de pays occidentaux seulement. Pour bien des actes violents dont parle Pinker, on ne dispose de chiffres attestés qu’à partir des années 1960, et plusieurs catégories, comme il le souligne, n’ont été conceptualisées que très récemment.
Quand les données empiriques font défaut, Pinker se rabat sur une constellation d’anecdotes. Par exemple, on sait depuis peu qu’Ötzi, la momie naturelle découverte dans les Alpes italiennes, qui date d’environ 5300 av. J.-C., est sans doute morte d’un coup au crâne : Pinker y voit une preuve décisive de la brutalité primitive de la vie au néolithique. Mais c’est un cas isolé, et les chercheurs n’ont aucune idée des circonstances de la mort d’Ötzi. Détail révélateur, l’ouverture du premier chapitre, consacrée à la « préhistoire humaine », où il entend planter le décor d’une violence omniprésente avant l’avènement de la civilisation, ne fait que deux pages (3). Comme on pouvait s’y attendre, Pinker minimise l’idée que les sociétés de chasseurs-cueilleurs nomades étaient relativement égalitaires et exemptes de guerres et de conflits [lire sur ce sujet controversé l’article deJohan van der Dennen]. De même, les innombrables « ensembles de données » que cite Pinker avec assurance d’un bout à l’autre de son livre viennent de sources qui diffèrent beaucoup quant à la perception de la violence, la définition des catégories, les techniques documentaires et les méthodes d’analyse. Au mieux, cette volumineuse compilation d’exemples donne l’impression d’une tendance à la baisse, mais on se demande en même temps si une collection tout aussi monumentale de contre-exemples ne pourrait être aussi aisément réunie.
La violence a bien sûr une histoire, que l’on peut écrire. Un projet plus réaliste serait néanmoins d’en explorer les types, le contexte et le sens, où et quand elle s’est produite. Ainsi abordés, les fièvres belliqueuses de l’humanité ont sans doute connu des hauts et des bas pour des raisons historiquement spécifiques. Même si l’on accepte la méthodologie de Pinker, et l’image vaguement univoque qui s’en dégage, de multiples questions d’interprétation se posent. Bien évidemment, quand on postule une réduction décisive du degré de violence au cours des temps modernes, il faut se colleter avec le bilan dramatique du XXe siècle, surtout durant la période 1914-1945 en Europe et sous le règne de Mao en Chine. De façon presque perverse, Pinker tente de contester l’idée que le siècle dernier ait été « le plus terrible des siècles » (au cours duquel la violence déployée par les États a entraîné environ cent millions de morts, selon l’estimation pétrifiante d’Isaiah Berlin (4)).
À cette remarque, et à des objections semblables, Pinker riposte tout au long de son texte par trois arguments : si atroces qu’aient été ces orgies de violence massive, elles ont provoqué moins de morts que les calamités antérieures, par rapport à la population totale concernée ; les bains de sang des deux guerres mondiales furent précédés et suivis par de longues périodes de paix ; et dans leur destructivité même, ces événements survenus au XXe siècle sont des aberrations à partir desquelles on ne peut généraliser.
À la lumière d’un tel plaidoyer, on se demande ce qui pourrait constituer une preuve légitime invalidant la thèse de Pinker. Sa lecture de la première moitié du siècle dernier n’est certainement pas celle des intellectuels de l’époque, comme Paul Valéry, Bertrand Russell, Albert Einstein, Sigmund Freud, Theodor Adorno, Aldous Huxley, George Orwell, Hannah Arendt et Raymond Aron. Ce n’est pas non plus ainsi que l’ont perçue les principaux dirigeants politiques du temps. Mais ce qui compte, c’est moins le pourcentage relatif de morts durant ces décennies que les méthodes et les motivations de la violence. C’était l’argument central développé par Hannah Arendt dans les années 1950, qui faisait du goulag soviétique et des camps de concentration nazis des institutions totalitaires archétypales sans précédent historique.
Pinker aurait peut-être été moins enclin à adopter l’idéologie progressiste s’il avait eu une connaissance plus approfondie du XXe siècle. Reflétant une vision très américaine, sa perception des atrocités alors commises s’articule autour de la Seconde Guerre mondiale, des purges staliniennes et de l’Holocauste. Il semble moins au fait d’horreurs comme le génocide arménien, la guerre civile en Russie, la famine en Ukraine soviétique, la conquête japonaise de la Mandchourie et les innombrables conflits liés à la décolonisation. Un travail qui interprète la chaîne de catastrophes survenues entre 1914 et 1945 comme un épiphénomène par rapport à une vision transhistorique plus large a peu de chances d’être avalisé par les historiens de métier.
L’Ouest et le reste
Si Pinker interprète ainsi le XXe siècle, c’est peut-être aussi en raison de sa conception de l’État moderne. Suivant l’argument classique que l’on trouve dans le Léviathan de Hobbes (1651), il présente la montée de l’État civil comme une force de pacification, de stabilisation et de civilisation dans l’histoire de l’humanité. Avant – ce que la philosophie politique appelait jadis l’« état de nature » –, la vie était faite de mortelles vendettas, de violences aveugles contre les enfants et les femmes, régie par des dirigeants tribaux brutaux et despotiques. C’est peut-être vrai, mais la médaille a bien sûr son revers. Les États souverains exercent un monopole sur l’usage légal de la force ; ils affirment leur droit et leur capacité d’entrer en guerre pour défendre ce qu’ils perçoivent comme leurs intérêts. Parmi les grandes puissances du long XIXe siècle (et sans doute parmi les superpuissances du court XXe siècle (5)), l’amour de la patrie et la haine des ennemis de la nation se sont avérés le ressort le plus puissant pour justifier l’agression.
Comme je l’ai déjà suggéré, l’ouvrage de Pinker est caractéristique d’une perspective solidement centrée sur l’Occident. « L’Ouest et le reste », comme disent les critiques, est une mentalité ici très présente. Pinker tire d’Europe et d’Amérique du Nord la grande majorité de ses faits historiques, et c’est de cette région du globe que sont originaires tous les facteurs de non-violence (l’imprimerie, les Lumières, l’humanitarisme religieux, les codes juridiques progressistes, etc.). C’est aussi de là qu’est issue la psychologie darwinienne, la tradition intellectuelle dont se réclame Pinker. La table des matières du livre inclut même des sous-sections intitulées « Le reste du monde », venant après des développements sur la situation en Grande-Bretagne, en France et aux États-Unis. Dans son analyse de la violence militaire, il n’est pas question des conflits menés en Afrique et en Amérique du Sud, ni des massacres coloniaux et des guerres d’indépendance. Cette histoire de la violence se déroule presque exclusivement dans l’hémisphère Nord.
Comme ce dernier trait le suggère, l’auteur semble particulièrement ignorant des violences liées à l’impérialisme. La modernité culturelle où Pinker voit la source du déclin de la violence a été en grande partie un jeu historique de gagnants et de perdants. Dans son récit bien connu du voyage du Beagle, Darwin observait avec tristesse le sort des indigènes qu’il avait rencontrés en Terre de Feu, des tribus indiennes d’Argentine et des Aborigènes d’Australie. Si Darwin avait visité l’Amérique centrale, l’Amérique du Nord, l’Asie et l’Afrique, il aurait été témoin du même processus : le vol des terres aux autochtones, les conflits avec les colons européens, la domination culturelle, l’exploitation économique, les migrations forcées, les morts causées par des maladies nouvelles, et enfin l’extinction ou la quasi-extinction. À quoi bon un déclin graduel de la violence au cours des millénaires si votre peuple et votre culture sont exterminés ? En outre, et c’est le plus incroyable, ces génocides commis au cours des trois derniers siècles furent souvent perpétrés en toute bonne conscience, au nom du « processus de civilisation » occidental. Se fondant opportunément sur une pseudoscience, les darwinistes sociaux ont naguère présenté les conflits humains, y compris l’extermination des races, comme nécessaires, naturels et profitables à l’ensemble de l’espèce.
Qu’en est-il enfin des nouvelles sources de violence qui apparaissent peut-être aujourd’hui ? Le lecteur reste sur sa faim, car Pinker n’offre aucune vision de l’avenir ; peut-être craignait-il d’être accusé de spéculation par ses collègues universitaires. Son tableau du passé et du présent laisse entendre, cependant, qu’il anticipe un développement des forces pacificatrices. Mais l’auteur n’évoque pas les effets possibles de la surpopulation et du réchauffement de la planète, entre autres facteurs.
« Le déclin de la violence est un triomphe que nous pouvons savourer, et une raison de chérir les forces de la civilisation et des lumières qui l’ont rendu possible », se gargarise Pinker dans la dernière phrase de son livre. Pourtant, en tant que psychologue évolutionnaire, il doit savoir que, biologiquement parlant, le cerveau humain d’aujourd’hui est celui-là même qui a éliminé les néandertaliens, rasé l’antique Carthage, motivé Gengis Khan, détruit les civilisations aztèque et maya, et mis en œuvre l’Holocauste. L’évolution opère sur une échelle extrêmement lente. L’espoir d’une obsolescence future de la violence réside donc exclusivement – sauf progrès inattendus du génie génétique – dans l’évolution sociale. Comme le bilan historique l’illustre copieusement, ce qui peut être fait par le conditionnement culturel peut aussi être défait. Dans des circonstances aujourd’hui imprévisibles, ne pourrions-nous pas retomber dans le pugilat primitif ? Anticipant les critiques, Pinker reconnaît bien volontiers que nous vivons encore aujourd’hui dans un monde déchiré par la violence. Autrement dit, même si nous acceptons son idée d’un déclin sur la longue durée, la baisse de l’expression de l’agressivité humaine qu’il souligne est au mieux relative. Notre monde reste si loin de l’abolition de la violence qu’il semble bien léger d’en saluer une possible régression partielle à long terme.
Le titre de Pinker est emprunté au premier discours d’investiture d’Abraham Lincoln. À l’hiver 1861, alors qu’il tentait d’éviter la sécession des États du Sud, le président récemment élu plaidait auprès de ses compatriotes pour qu’ils surmontent leurs haines sectaires et préservent les liens d’affection entre eux en s’appuyant sur « les bons anges de notre nature ». La formule est noble. Mais deux mois plus tard éclatait la bataille de Fort Sumter, qui ouvrit l’une des guerres les plus sanglantes de l’histoire des États-Unis. Quatre ans après, tandis que s’achevait le conflit, Lincoln fut assassiné par un sympathisant confédéré ; dix ans plus tard, les lois Jim Crow inauguraient une période de lynchages et plusieurs décennies d’horribles violences raciales. Comme la formule de Lincoln, le livre de Pinker est l’expression personnelle d’un certain idéalisme moral, mais pas, hélas, une description de la réalité historique.
Cet article a été publié dans le Times Literary Supplement le 9 mars 2012. Il a été traduit par Laurent Bury.
Notes
1| Konrad Lorenz, L’Agression, une histoire naturelle du mal, Flammarion, 1977. Sur la position de Freud, on peut lire l’ensemble de textes réunis dans Sigmund Freud, Anthropologie de la guerre, Livre de Poche, 2011.
2| « Sur le processus de civilisation » est le titre d’un livre du sociologue allemand Norbert Elias paru à Bâle, en allemand, (hélas) en 1939. Il a été publié trente ans plus tard en français en deux volumes : La Civilisation des mœurs et La Dynamique de l’Occident.
3| Pinker revient plus en détail sur ce sujet dans le chapitre 2, où il montre que les taux de mortalité due à la guerre étaient beaucoup plus élevés dans les sociétés sans État que dans les sociétés avec État.
4| Le philosophe et historien des idées Isaiah Berlin, témoin dans sa jeunesse de la révolution bolchevique, est mort en 1997.
5| Le « long » XIXe siècle: de 1789 à 1914. Le « court » XXe siècle : de 1914 à 1989.